En quête de paix.

La crypte était au final bien plus accueillante que ce à quoi Flamina s’était attendue d’un personnage tel le Sieur Christophe. C’était presque étonnant. Elle n’allait cependant pas se plaindre du fait que ce jeune prêtre avait probablement fait forcing sur son maître pour les fauteuils. Elle remarqua également l’ampoule. Les refuges étaient désormais tellement bien appareillés… Enfin, c’était une Nosfératu dont le lieu de prédilection était le manoir d’une de ses goules qui pensait ça.

Remerciant d’une inclinaison de la tête la proposition muette que lui fit le Malkavian de s’installer dans un des fauteuils, elle obtempéra. Il aurait été bien triste pour ces charmants objets de n’avoir aucune autre utilité que celle de prendre la poussière tandis que le seigneur des lieux faisais les cent pas autour d’eux en un circuit aussi aléatoire que possible. S’il fallait étudier les traces de ce Malkavian, à coup sur, la théorie du Chaos ferait un bon significatif.

Le Vampire parla à nouveau de son habituelle voix caverneuse. Rien ne semblait avoir changé depuis leur première rencontre, comme si elle n’avait pas, quelques temps auparavant à peine, dérangé une cérémonie de la plus haute importance pour le Malkavian.

Il vous prie de... l'excuser... de devoir vous accueillir en ce... lieu...
Vous êtes... surveillée... Il le sait. Vous le savez.
Pourquoi les rats observent-ils leur mère ?

Observateur, en effet. A quoi s’attendre d’autre d’un vampire de son âge, vraiment ? Bien, au moins cela lui donnerait un sujet sur lequel rebondir. Après tout, si elle s’était aventurée ici, c’était bien pour obtenir des conseils. Si Fortunato n’était plus en mesure de les lui fournir, peut-être le Sieur Christophe le pourrait-il après tout.

« C’est exact. Je suis surveillée. On observa sa mère lorsqu’on craint qu’elle ne commette l’irréparable, sans doute, Sieur Christophe, on observe sa mère lorsqu’on la sait lasse des guerres et des conflits, seulement désireuse de se retirer, de disparaître du paysage. On l’observe lorsqu’on doute – avec raison peut-être – de son allégeance, de sa fidélité. Je n’ai pourtant aucune volonté de me battre dans le camp opposé, mais aucune volonté non plus d’aller à l’encontre des élans de mon âme. Sieur Christophe, vous qui êtes mon aîné, vous devez comprendre les tourments d’une âme retenue trop longtemps dans la non-vie. Cette voie que vous suivez vous donne-t-elle la force d’endurer la fatigue que les siècles déposent sur le corps et l’esprit ? »

Un silence. Flamina estima qu’elle lui devait la vérité, sans nul doute, et qu’il la découvrirait de toutes façons bien assez vite.

« J’ai fait, il y a quelques soirs, une bien étrange rencontre. Un fils des Abysses, encore jeune à notre échelle, bien vieux pour les humains. Ce vampire est évêque, j’aurai sans doute dû le tuer. Et pourtant, nous avons conversé sous une lune neutre tous deux. Je l’ai soustrait aux Sorciers qui le cherchaient puisqu’il a eu le bon goût de renoncer à ses plans de destructions initiaux. Il voulait attenter, m’a-t-on dit, aux jours du jeune primogène Tremere du côté de l’Aéroport. De notre côté, nous avions quelques dissensions… internes, dirons-nous à régler. »

Non sans un sourire, elle se remémora brièvement l’arrestation et la probable destruction du traître. Quelle idée vraiment, de trahir au sein des Masques alors qu’il suffisait d’une demande pour que les deux camps se rencontrassent.

« Cette lune neutre, messire Christophe, a je le crains éteint les dernières velléités de combat qui me hantaient. J’ai donné trois siècles à notre chère Camarilla, trois siècles à obéir en tout, et ne rien contredire. Puis, sans que ma loyauté ne décline, le temps a fait son œuvre, et je me suis retirée du champ de bataille. Je suis devenue cet étrange ermite qui se tient là devant vous. Prête à prendre les armes si on l’exigeait d’elle, mais réticente malgré tout à le faire. Ce jeune Lasombra porte déjà sur les épaules la même lassitude qui est la mienne. Ni l’un ni l’autre ne voulons combattre, et je me plais à croire qu’une entente serait sans doute possible en d’autres temps, d’autres lieux, d’autres circonstances. Mais… cela doit vous sembler dérisoire, Sieur Christophe. C’est pourtant vers vos lumières que je me tourne en cette période trop sombre. »

Fiche par Narja

En quête de paix.

Le Sieur Christophe s'avérait extrêmement clairvoyant comme toujours. Tandis qu'elle parlait, Flamina Adams l'observait du coin de l'oeil s'affairer autour d'une cuve d'eau. Quiconque n'avait pas autant d'âge se serait sans doute offusqué d'un tel comportement, pourtant, l'Ancienne Nosfératu y voyait là un comportement extrêmement symbolique. Tandis qu'il dissolvait les marques de l'augure sur ses bras, et que le sang se noyait dans l'eau claire, s'allégeant des marques visibles de la tourmente, Flamina, elle, lui laissait en dépôt les peines de son cœur fripé par les ans.

Mais le symbole, en cette nuit, ne saurait certainement éclipser la raison de sa présence ici. Le Malkavian lui avait répondu, et ces réponses méritaient une réponse, quelque qu’elle fût.

« Les enfants des Ombres... sont fascinants.
Il a toujours apprécié leur ...intelligence... leur noblesse... leur foi.
Il est fort dommage... et dommageable... qu'ils aient choisi le mauvais côté lorsque le clivage a eu lieu. »

Fascinants, oui, c’était le mot. Flamina avait côtoyé peu d’enfants de l’Abysse, et nombre d’entre eux avaient fini plus morts que vifs. Pourtant, il en était un qu’elle avait épargné. Cet enfant… un enfant de quatre siècles ou presque, mais il restait un enfant à ses yeux. Cette remarque du sieur Christophe ramenait une fois encore la Nosferatu à la dure réalité : ils étaient en guerre. Oui, il fallait qu’elle le garde à l’esprit, mais pour les dernières décennies, cette réalité s’était estompée en douceur jusqu’à disparaître de ses préoccupations. Et parfois, le tout ressurgissait désagréablement lorsqu’elle croisait la route d’un vampire intéressant.

« Leur choix... a été fait... cependant.
Ce Lasombra... dont vous parlez... est évêque. Imaginez... un Marquis... qui voudrait se retirer. Que ferait... un Prince sensé ?
Les Lunes neutres... sont des utopies. »

Paroles vraies, paroles exactes, paroles détestées. Voici ce qui s’échappa d’entre les lèvres de l’Ancien. Dans un murmure, dans son sempiternel souffle rauque et terrifiant pour quiconque n’est pas préparé à pareille rencontre. Des Mots tout à faits conforme à la réalité, et l’ancienne les avait sans doute que trop oublié. S’éloigner de cette guerre, du Jyhad, mais aussi de la rivalité entre secte était impossible, voici ce qu’essayait de lui dire Christophe. Voici ce qu’était le véritable sens du mot « utopie ». Flamina écouta encore.

« Vous êtes... une Ancienne.
Reconnue par vos pairs. Respectée par vos enfants. Élevée dans le but de servir la Très Sainte Camarilla.
En d'autres temps... en d'autres circonstances... Quel serait... votre choix ? »

Flamina laissa un long silence à méditer ces mots, tout ce qu’elle avait entendu. Quel aurait été son choix en d’autres circonstances ? Lorsqu’elle se mit à parler, ce fut en toute franchise, sans avoir le moins du monde préparé son discours auparavant.

« Je crains que vos sages paroles ne sont que trop vraies, messire Christophe. Le choix dans cette guerre a était fait par les enfants des Abysses, choix discutable mais irrévocable, en effet. Un prince sensé ne m’aurait sans doute même pas laissé achever mon discours, et je crains que vous ne souyez en train de discourir avec un cadavre en sursis. Qui sait ce qu’il adviendra de la mère des masques lorsque la nouvelle arrivera aux oreilles de notre Prince, je ne me complairai pas en hypothèses. Une Ancienne qui croit encore aux utopies, ne trouvez vous pas cela pathétique, Sieur Christophe ? Je n’ai que trop conscience de ma délicate position à présent, je le crains. »

Un nouveau moment de silence. Alors, qu’aurait-elle fait en d’autres temps ?

« Je ne rejette pas notre chère Camarilla, Messire, je ne la rejetterai pas. Mais en d’autres temps, en d’autres circonstances, j’aurai certainement déposé les armes, renoncé à combattre. Je m’en serai allée, et j’aurai parcouru le monde à la recherche de la Paix. Cela, je ne peux le faire, et jamais je ne combattrai sous le drapeau ennemi. Cependant, puis-je encore prendre part à ce combat qui semble désormais si lointain, si éphémère… Je ne suis qu’un masque parmi tant d’autres, après tout, qu’un rat qui effraye davantage qu’il n’inspire la confiance. Seul mon passé de guerrière m’aura protégée, je le crains, et seul mon grand âge me garde désormais. Ce même âge qui me donne le sentiment d’être le vestige d’une époque révolue, une trace du passé qui n’a plus sa place. Ne devrions-nous pas, Messire Christophe, laisser le sang s’éclaircir jusqu’à devenir de l’eau ? Dissoudre cette malédiction, et nous éteindre dans un dernier sommeil en quête de rédemption. Ce monde ne nous appartient pas, il ne nous a jamais appartenu. Ne faudrait-il laisser cette terre une bonne fois pour tout à l’humanité ? Le règne de la nuit n’a-t-il pas que trop duré ici ? »

Quelle raison, vraiment, avait-elle de demeurer ici encore ? Si elle n’avait aucune sympathie pour le Sabbat, en avait-elle davantage pour la Camarilla ? La réalité qui l’attirait le plus était cet exil, un long exil dans les limbes de l’oubli. Une légende qui disparaîtrait, qui vacillerait comme une flamme avant de s’éteindre pour une cause nouvelle peut-être, qui aurait embrasé une dernière fois ce cœur séculaire.

Fiche par Narja

En quête de paix.

Les signes d’agacement et de colère contenue du Malkavian étaient flagrants. Tandis que la Dame aux Masques discourait, elle vit les longs doigts squelettiques se plier et se déplier. L’agacement, non. Ce n’était pas de l’agacement. Il n’y avait pas besoin d’Auspex pour le voir, la fureur du Malkavian suintait de chacune des pores de sa peau. Flamina se prit à avoir peur de ce qu’elle pouvait avoir réveillé. Parfois, à discourir avec un Malkavian, on oubliait ce qu’était précisément celui-ci, et lorsque la folie affleurait enfin, il était bien souvent trop tard.

L’avait-elle poussé dans ses derniers retranchements ? Ses doigts pianotaient le vide de plus en plus vite, puis il se détourna dans un grognement. Elle devina qu’un terrible combat intérieur avait lieu dans l’esprit du séculaire Ancien, un combat qui ne saurait être gagné ou perdu. Un combat duquel dépendait sa non-vie. Quelle prix prêtait-elle à cette existence ? Quel espoir pourrait-elle voir au bout du chemin ? Quelle rédemption pour une âme tourmentée depuis tant de siècles ?

Le Malkavian cessa de s’agiter. Immobile, il était sans doute plus terrifiant encore. Sa voix se fit murmure grave, qui emplit tout l’espace sonore. Une demande ? Non, c’était bien plus que cela, c’était plus insidieux, plus terrible, plus déterminant. Un choix, un ordre. La suite des événements dépendait de la réponse à ces questions.

Qu'attendez-vous de nous ?
Le pardon ?
Une forme de rédemption ?
Ou... une libération... nette et parfaite ?

Qu’attendait-elle ? Elle n’aurait su le dire avec certitude. Qu’avait-elle espéré en commettant l’erreur de venir là ? Car c’en était peut-être une après tout. Un Malkavian n’est pas un Nosfératu, et il existait autant de Malkavian que de forme de folie. Une infinité.

Mais il devrait y avoir une réponse ce soir, elle était attendue. Flamina ôta son masque, ne cherchant même pas à dissimuler son visage ravagé par la malédiction vampirique. Elle était là, hideuse, simplement hideuse, l’objet posé sur ses genoux.

« Aidez-moi à trouver la paix en mon âme, Messire Christophe. Je ne vous demande que cela. Aidez-moi, s’il vous plaît. »

La phrase avait été prononcée d’une voix neutre, une réponse qui ne nécessitait aucun développement, une réponse qui se suffisait à elle-même. Un sentiment étrange étreignait le cœur desséché de Flamina, elle se sentait comme au bord des larmes sans pouvoir en saisir la source. Elle se sentait sur un point de non retour, un moment de basculement. Il lui faudrait survivre ou mourir, il faudrait que son esprit survive ou meurt. Elle ne pouvait rester hantée par cette existence, ces six siècles d’existence. Le monde avait changé, il y avait désormais un tournant à négocier.

Fiche par Narja

Spoiler:

En quête de paix.

Flamina Adams n’avait pas bougé d’auprès le sieur Christophe. Immobile, elle se sentait désarmée, une fois n’était pas coutume, perdue, comme un enfant qu’on aurait abandonné sur le bord du chemin. Ce visage, elle le révélait rarement, prenant soin de toujours le dissimuler, l’oublier dans un pan de sa mémoire, une négation, sans doute que faisaient beaucoup d’enfants des Masques.

Christophe s’était tourné vers elle, et avait rabattu sa capeline ; dévoilant lui aussi son visage. Une figure aux traits durs, au port altier. Un guerrier, oui, c’était le mot qu’il inspirait à la Dame des Masques. Que ferait-il, qu’allait-il décider ? C’était la question qu’aurait sans doute du se poser Flamina. Elle ne se la posa pas, toutefois, trop perdue, peut-être, trop fragile pour se le demander. Elle attendait, simplement, un événement, quelque chose, quoi que ce fût, que ferait le Malkavian.

Il plongea son regard perçant dans ses yeux, elle en eut un frisson, ces deux iris clairs semblaient capables de sonder à tout instant son âme. A cet instant là, Flamina eut la sensation que la folie des enfants de la lune était usurpée, sans doute étaient-ils bien plus clairvoyants que ce qu’on pouvait imaginer, et que cette folie n’était qu’un masque, un revers de la clairvoyance. Enfin…

Quelques prières en latin dont elle comprit parfaitement le sens, n’était-ce pas une langue qu’elle-même avait beaucoup pratiquée de sa jeunesse ? Aussitôt, la paix se fit en son esprit. Une paix qu’elle n’avait pas ressentie depuis de nombreuses et trop longues nuits.

La paix... Nous pouvons apporter la paix... à votre esprit.
Pas à votre âme. Et de manière provisoire. Pour le moment.

Les peurs et les angoisses s’envolèrent, la Nosferatu retrouva un semblant de contenance. Comme c’était plaisant et apaisant. Comme cela lui avait manqué. Le Malkavian n’en avait pas fini avec elle, toutefois.

S'il vous venait de... recroiser le chemin... de cet Enfant des Ombres... Revenez nous voir.

Flamina aurait pu débattre éternellement du sens profond de cette phrase, lui faisait-il cette demande pour à nouveau juger de son âme et de sa fidélité à la Camarilla, ou avait-il dans l’idée de se servir de l’occasion pour détruire Shiro-chan ? Dans l’un et l’autre cas, elle le ferait, oui. Ne fût-ce que parce qu’elle avait conscience de ce qu’elle devait en ce soir d’égarement au Malkavian. Elle se releva, replaça son masque, et courba la tête devant Christophe.

« Messire, je ne peux que vous être reconnaissance de l’attention que vous m’avez accordée, de la paix que vous m’avez apportée. Je reviendrai, oui, soyez-en assuré. »

Il lui fallait à présent prendre congé. Lui avait été vaguement dit qu’il fallait désormais trouver un nouveau primogène au clan, et elle était attendue à une réunion de la plus haute importance. Malheureusement, la nuit n’était pas éternelle.

« Une assemblée des Masques se tiendra dans quelques instants, je crains de devoir repartir, Messire Christophe, pour m’y présenter. Encore une fois, vous avez toute ma reconnaissance, je n’aurai pu m’y présenter dans cet état d’affolement, je vous dois beaucoup ce soir.»

Elle attendit qu’il acceptât de la libérer, ainsi que l’exigeait la coutume et la bienséance.

Christophe est fourbe… j’adore xD Du coup, on enchaîne une fois ce RP bouclé ? Parce que temporellement parlant, cette rencontre-ci est avant la 2e lune que je viens d’achever avec Shiro et Gabrielle, donc… techniquement, je suis censée revenir voir pépé Malkave ^^. Ah; et je risque d'être absente sur le reste du WE, GN ce soir, puis anniversaire de ma maman demain, ça va être épique ^^

Fiche par Narja