Le Griffith Observatory était un observatoire astronomique situé à 300 mètres d'altitude sur la face sud du Mont Hollywood. L'endroit était très fréquenté des touristes durant la journée, notamment pour le panorama qu'il donnait sur toute la région, depuis le centre ville de Los Angeles jusqu'à l'océan.

Jaime avait choisi le lieu parce qu'il était simple à trouver pour quelqu'un qui venait d'arriver, et parce que la nuit ne s'y trouvait quasiment personne. Le bâtiment était souvent ouvert en début de nuit pour permettre aux visiteurs d'admirer les étoiles, mais à cette heure déjà avancée, les vampires seraient tranquille. Et puis ce n'était qu'un point de rendez-vous, ils pourraient librement vagabonder par la suite.

Il avait été prévenu vers vingt-trois heures qu'un corbeau tenait à lui parler. Remerciant mentalement James de lui avoir enseigné le langage animal, le Ravnos écouta le message de l'animal, amenant la nouvelle de la venue d'un Ancien Ravnos qui tenait à le rencontrer.
Jaime n'aurait su dire s'il s'en réjouissait ou si la nouvelle était mauvaise. Les Ravnos n'étaient pas aussi solidaires que les Gangrel, et la venue d'un puissant membre ne serait pas nécessairement bien accueillie. Tout dépendait du vieux en question...
Le nom d'Alexandros ne disait rien à Jaime. Il ne connaissait certes pas tous les Anciens de la terre, n'étant jamais sorti des Etats-Unis, mais le fait était tout de même étonnant.

Quoi qu'il en soit, le Ravnos avait proposé à son aîné une rencontre à une heure du matin devant l'observatoire. Après avoir prévenu son frère James de l'endroit où il allait et pourquoi, il prit la moto et traversa les hectares de forêt sauvage puis les sentiers plus civilisés qui le séparaient du mont Hollywood. La bécane était habituée à rouler sur des routes peu praticables, et les côtes de la grande colline n'avaient pas de secrets pour elle.
Jaime gara l'engin à quelque distance pour terminer le trajet à pieds et venir s'asseoir sur les marches de l'entrée de l'observatoire.

Il avait quelques minutes d'avance, mais de toute manière, si l'autre Ravnos était Ancien, il serait sans doute capable de détecter son aura et de le reconnaître. Pour sa part, il sifflotait une petite mélodie joyeuse en sondant régulièrement les environs et le ciel, à la recherche d'un vampire ou d'un corbeau...

Jaime repéra en premier lieu le corbeau qui survola la grande allée et passa au-dessus de sa tête, sans doute pour aller se percher sur le dôme central de l'observatoire. Puis les bruits dans les fourrés annoncèrent la venue de l'autre Ravnos avant même qu'il n'apparaisse à ses yeux.
La lune était haute dans le ciel clair, et avec l'assistance surnaturelle de l'auspex, on y voyait presque comme en plein jour.

L'homme qui s'avançait vers lui était âgé, son visage rond était strié par les rides, ses cheveux courts et sa barbe étaient parsemés de blanc. Il était vêtu sobrement mais élégamment. Une allure passe-partout. Beaucoup de jeunes Ravnos affichaient un goût prononcé pour les couleurs et l'exubérance. Pas celui-ci. Mais il n'était pas jeune, selon les dires de son corbeau.
Jaime, quant à lui, portait un blue-jean, un tee-shirt blanc, sobre, et son éternel perfecto de cuir. Rien de bien extravagant non plus, mais son visage et ses yeux bleus reflétaient une jeunesse éternelle et une beauté d'ange innocent.

Le vieux Ravnos s'approcha nonchalamment, Jaime continuait de siffloter, un sourire amusé aux lèvres. Lorsqu'il s'assit et tendit la main, le Prince des Gitans la prit et la serra sans hésiter.
Il inclina la tête en voyant le serpent, mais ne manifesta aucune peur ni dégoût, simplement un étonnement joyeux.

J'ai vu de nombreuses choses sortir des manches de mes frères, mais ça c'est une première. Vous êtes bien entouré.

Jaime n'avait jamais été très doué avec les animaux, cela ne faisait pas partie de ses dons innés. Il avait fallu que son frère lui enseigne la communication avec les diverses espèces peuplant cette terre, ainsi que la manière de les appeler. Mais le Ravnos n'avait pas poussé au-delà son apprentissage, préférant la compagnie des hommes - et surtout des femmes - à celle des animaux.

L'endroit est isolé de tout, surtout à cette heure de la nuit. Vous sembliez tenir à me rencontrer personnellement. Quant à moi, j'aime savoir qui parcourt mes terres... Pourriez-vous me faire une petite démonstration de vos talents ? Que je puisse véritablement vous appeler "frère"...

Le Ravnos se montrait méfiant ces derniers-temps, depuis que la guerre faisait rage entre la Camarilla et le Sabbat. Des semblables malavisés auraient pu vouloir s'infiltrer sur le territoire des deux Prince. Jaime voulait simplement s'assurer que ce nouveau-venu était bien Ravnos, et voir quelle était la mesure de son imagination.

La Chimérie... Un don puissant, merveilleux et infernal à la fois. Les Ravnos apprenaient dès le plus jeune âge à manier les illusions, à les utiliser à leur avantage, pour tromper les autres et modeler le monde selon leur volonté. Nombreux étaient les Gitans qui s'étaient perdus dans leurs rêves.

Il arrivait parfois que Jaime et ses frères organisent des concours secrets de Chimérie, pour mesurer leurs talents, s'entraîner, et s'amuser. Mais ce don n'était pas qu'amusement. C'était une arme. Une arme terrible. Bien entendu, tout Ravnos digne de ce nom savait qu'il ne fallait jamais se fier aux apparences, et que l'on ne percevait du monde que ce que l'on voulait bien en voir.

Ce soir, Jaime était un enfant. Un jeune homme émerveillé qui contemplait les merveilles que lui donnait à voir son ancêtre. Il aurait aisément pu refuser de voir. Mais ce n'était pas le but.
Il admirait l'imagination et la créativité de Phosphoros. Il croisait peu de puissants Ravnos. Celui-là, c'était certain, maîtrisait parfaitement son art.
Jaime rit en voyant le dragon lui foncer dessus. Il n'avait pas peur. Il était interdit de détruire un frère. Les Ravnos devaient lutter ensemble, même s'ils étaient rarement véritablement unis.

Les papillons étaient splendides, mais pas autant que la sphère de lumière qu'ils constituèrent. Jaime était une créature de la nuit, mais il aimait le soleil. Il aimait ce soleil mystique qui ne lui faisait aucun mal. Ce soleil qui, si il le désirait, pourrait réduire en cendres ses ennemis. La puissance de la Chimérie...
Phosphoros parlait de rêves et de cauchemars. Il l'invitait à une exploration de sa vision du monde. Mais Jaime ne prit pas sa main. C'était son tour à présent.

Vous rêvez un monde de magie, mon frère.

Il aurait aimé pouvoir modifier ce soleil, jouer avec l'illusion déjà en place. Mais c'était impossible. L'on ne pouvait changer ce qu'un autre avait créé de toutes pièces. Là était la limite de ce don extraordinaire. Il fallait user de trucages.
Jaime perça l'illusion de son ancêtre, la fit disparaître, pour instantanément la remplacer par une similaire. La sphère lumineuse, qu'il contrôlait désormais, commença à vibrer, pulser sur un rythme binaire, comme le battement d'un coeur gigantesque. Son reflet bleuté se teinta de veines rouges. Puis le gigantesque organe bouillonnant se mit à grossir au rythme de ses battements, grandir, grandir jusqu'à obstruer tout le ciel au-dessus d'eux. Le monde se teintait d'un brouillard rouge.
La sphère explosa soudain, sans un bruit, répandant sous elle des milliers de gouttes carmines. L'observatoire, le chemin, les arbres, les Ravnos, en furent recouverts.
L'atmosphère changea alors. Le sang répandu au sol se mouva, se rassembla en diverses flaques qui s'élevèrent pour se transformer en silhouettes féminines et voluptueuses. Bientôt les silhouettes prirent un aspect humain, et une dizaine de femmes aux formes parfaites s'avancèrent d'une démarche féline vers Phosphoros et Jaime. Elles formèrent une ronde autour d'eux pour entamer une danse sensuelle du plus bel effet. Enfin, cinq d'entre elle s'emparèrent en douceur du corps de Phosphoros pour le couvrir de baisers, tandis que les cinq autres s'occupaient de Jaime.

Voici mon monde, Alexandros. Plaisir et destruction. Amour et mort.

Le Ravnos tapa dans ses mains, et lumière rouge, sang et filles disparurent, laissant les deux frères de clan revenir à la réalité.

Jaime avait bien puisé dans ses forces pour créer une illusion d'une telle ampleur, si grande et si complexe, mais cela valait le coup. Il n'était pas Ancien au sens strict du terme, mais il écumait la terre depuis plus de deux siècles, et n'avait cessé d'améliorer ses dons chimériques. Aussi le compliment d'Alexandros, puissant Ravnos de toute évidence, lui fit énormément plaisir. Il s'inclina en souriant, lorsque son ancêtre le qualifia de grand illusionniste. Oui, il en était fier. Il n'était pas le Prince des Gitans pour rien.

Alexandros lui fit part de sa demande. Voilà pourquoi il lui avait envoyé son messager animal, voilà pourquoi il souhaitait le rencontrer. Il ne comptait pas être seulement de passage, comme la majorité de ses frères qui passaient dans la région. Il comptait s'installer dans la région pour lutter contre les autres vampires.
Hum...
Jaime sourit à son frère de clan, et lui donna une tape amicale sur l'épaule.

Bien entendu frère, ces lieux nous appartiennent, vous pouvez rester tant que vous le voudrez.

Jaime songea à son frère, son frère de sang. Comment réagirait James en voyant s'installer un vieux et puissant Ravnos ? Le Gangrel comprenait la Voie de son frère mais il était loin de toujours l'accepter. Un puissant Pitre pouvait être perçu comme un danger pour ceux qui n'étaient pas initiés au Paradoxe.

Je dois cependant vous inciter à la prudence et à la discrétion. Le Griffith Park appartient aux Ravnos et aux Gangrel, c'est un fait établi. Mais évitons de semer le chaos de manière trop ostentatoire, ou nous nous retrouverons avec les deux sectes sur le dos...

Un Ravnos avec une volonté de sédentarisme, voilà qui troublait tout de même Jaime. Certes, lui-même était à Los Angeles depuis bien des décennies, mais il accomplissait ici un but précis et important pour son clan et celui de ses cousins. Aussi posa-t-il la question :

Vous avez des projets particuliers ?

Ah, à présent le Ravnos parlait d'un court séjour... Mais s'il était Ancien, quelle pouvait bien être sa définition de "court" ? Une semaine ? Un mois ? Une année ? Une décennie ? Allez savoir ! La présence d'un puissant Ravnos risquait fort de bouleverser la ville, surtout s'il comptait être actif. Mais tant qu'il ne nuisait pas à l'équilibre du Griffith Park, cela ne dérangeait pas Jaime. Au contraire. Il avait de moins en moins de temps pour s'occuper de remettre de l'ordre dans le chaos et du chaos dans l'ordre établi.

Alexandros assura qu'il ne comptait pas détruire l'harmonie du domaine des frères Forel. Bien. Les Ravnos ne se mentaient pas entre eux, c'était extrêmement mal vu. S'il manquait à sa parole, il serait traqué et exécuté, et Jaime ne doutait pas que son frère et sa meute seraient les premiers à bondir.
L'Ancien avait bien un projet précis, mais il n'en parlait pour le moment qu'à mots couverts. Jaime lui adressa un sourire un brin goguenard, et répondit :

Tout dépend de mes frères, et tout dépend de la chose dont il faut s'occuper.

Il leva alors les yeux vers le ciel et siffla, imitant le ululement de la chouette. Rapidement un de ces oiseaux nocturnes vint à lui. Ils échangèrent quelques paroles silencieuses, et l'oiseau reprit son envol.

J'invite mon frère à nous rejoindre. Si vous comptez rester quelques temps, il faut bien qu'il vous rencontre.
Ne vous en faites pas, ça ne devrait pas être long : à vol d'oiseau, le parc se parcourt vite. James a cette faculté particulière de pouvoir se changer en chauve-souris... un animal fort laid, mais bien pratique !

Le vieux Ravnos appréciait donc les Gangrel... voilà qui était un bon point. Les relations entre les deux clans étaient toujours complexes, certains se considérant comme des cousins, d'autres comme des ennemis. Mais en ce lieu, celui qui venait pour déclarer la guerre à l'un des deux clans se retrouvait avec une forte alliance sur le poil.

Ils font en effet partie de ces rares vampires respectueux du monde et des cycles de la vie.
Et James est mon frère... Il a reçu ma promesse que je le tuerai en dernier.

Tous les vampires finiraient par mourir, c'était inéluctable, c'était le but des Pitres, de manière fortement résumée. Si Jaime survivait jusqu'à la fin, James serait le dernier qui serait détruit, avant lui-même bien entendu.
Et si la funeste nuit venait où Jaime devrait choisir entre son frère et son clan... Mais il préférait ne pas y penser. La route était encore longue.

Alexandros resta silencieux un moment, tandis que Jaime observait le ciel, attendant l'arrivée d'une chauve-souris ou d'un faucon, selon l'humeur du Gangrel. James pouvait arriver d'un instant à l'autre.
Le vieux Ravnos reprit finalement la parole, semblant décidé à en dire plus sur son but. Jaime sourit. Ses suppositions se confirmaient.

Vous êtes donc un traqueur.
Le Weig doit rester libre, il doit pouvoir voguer à travers le monde, car ainsi il doit être. Le changement est capital, l'éternel mouvement, l'éternel renouvellement.
En cela, je suis bien évidemment un Pitre convaincu, et je tente d'oeuvrer lorsque je le peux à la destruction des talismans et autres objets occultes qui renferment le Weig. Mais c'est une tâche longue, complexe et ardue.

Seuls les plus vieux et les plus puissants des Pitres pouvaient se permettre de se lancer fortement dans la lutte contre l'occulte. Jaime le faisait lorsqu'il en avait l'occasion, et s'il pouvait aider Alexandros, il le ferait avec plaisir.

La réponse de Jaime sembla satisfaire Alexandros, qui lui adressa ce que l'on pouvait qualifier de sourire, même s'il était plus malsain et inquiétant que joyeux et rassurant. Le sourire d'un Ancien Ravnos... L'une des créatures les plus dangereuses qui soit sur terre, pour les autres vampires en tout cas. Jaime avait été impressionné par la puissance d'Alexandros, mais il n'en avait pas peur. Il l'admirait, au contraire, et était impatient de voir ce que son aîné avait à lui montrer.

Il lui montra une petite boite. Une petite boite noire, cerclée de chaînes d'argent. Un objet sobre, à première vue insignifiante. Mais pas pour un Ravnos. L'objet était tellement gorgé de Weig perverti que Jaime en eut la nausée.
Une noirceur propre à la mort, le chaos à l'état pur, une arme de la Géhenne.
Jaime observa l'objet avec son don de double-vue, et perçut aisément les stries qu'il distinguait habituellement chez de nombreux vampires.

Un talisman créé par un vampire.

Immédiatement il songea aux Tremere, ces vils sorciers capables de créer tout et n'importe quoi, les pires ennemis du changement perpétuel voulu par l'univers.
Puis il vit autre chose. L'aura tremblait légèrement, comme si elle avait été entourée d'une fumée presque indétectable. Une aura que le Ravnos avait déjà vu, lorsqu'il s'était un peu trop approché d'un clan bien précis...

Giovanni ?

Sa voix n'était guère plus qu'un murmure, tandis que ses yeux étaient plongés dans les profondeurs occultes de l’artéfact surpuissant. Sa fascination était grande. Jaime n'était pas à proprement parler un grand occultiste, il s'occupait plus de la survie de son clan et de la chasse aux vampires nuisibles que de la recherche du savoir magique. Il ne savait pas ce que pouvait faire cette boîte. Mais il ressentait sa puissance au plus profond de son âme, il sentait sa noirceur résonner en lui. Il s'approchait du talisman, lentement, sans vraiment s'en rendre compte. Il leva la main, pris d'une envie irrépressible de la toucher.

C'est alors qu'un puissant cri animal résonna au-dessus d'eux. Le cri perçant d'un sublime faucon, qui volait à toute allure vers eux. L'appel de son frère brisa aussitôt le charme, et Jaime recula, honteux et en colère de s'être presque laissé prendre, d'avoir failli succomber à une tentation vile, mais propre à son clan.

Contrairement à ce que prédit Jaime, ce n'est pas une chauve-souris qui s'approcha d'eux, mais bien un rapace qui pourfendait les airs du Griffith Park pour rejoindre cet endroit où les deux ravnos s'étaient trouvés.

C'est bien un faucon qui s'approcha d'eux, un magnifique faucon pèlerin qui apparaît à la vu des deux vampires. Un cri résonna alors que l'oiseau s'approchait d'eux.

Oui, le frère arrivait, oui, il avait répondu à l'appel de son frère. De celui qu'il souhaitait plus que tout protéger. Il avait abandonné un jeune loup en plein entraînement du sang des Gangrels mais rien n'était plus important que Jaime. Après toutes ses années, il était le seul qu'il lui restait.

L’atterrissage, il fut fait de haut. Dans les airs même, alors qu'il piquait sur eux, le Gangrel se retransforma pour tomber juste devant eux, se réceptionnant sur un genoux. Il était sérieux, le visage fermé. Les dernières nuits n'avaient pas été de tout repos, entre les lupins présent ou encore les nouveaux arrivants. James était fatigué, il rêvait de pouvoir courir, pendant une nuit, de disparaître aux yeux de tous pour pouvoir enfin se laisser aller totalement.

Mais ce soir, à nouveau, le Prince des loups était présent, à face à Jaime, et à un inconnu. Lui ne possédait les disciplines de clair-voyant mais sans cela, il savait déjà que ce n'était ni un louveteau, ni un jeune ravnos qui se trouvait devant lui. Qui qu'il soit, quoi qu'il soit, il était puissant. James doucement se releva, fixant l'inconnu des yeux avant de se tourner vers son frère. Ce n'était pas à lui d'engager la conversation. On lui avait demandé de venir. C'était lui dans un sens de demander ce pourquoi on l'avait fait venir, ou alors que Jaime prenne la parole. Mais concrètement, pour l'instant, il n'avait rien à faire à part les observer.
Et cela lui permet de constater d'un chose : du trouble qui semble avoir pris son frère. Est-ce qu'il était un simple semblable ? James commençait à penser que non, réellement. Sa voix un peu sombre, profonde ce soir, se mit à résonner sur l'endroit silencieux :

-Qu'est ce qu'il se passe ici …

Furent les seuls mots qui passèrent les lèvres de James alors que ses yeux non pas inquiet mais au début de la colère, se posèrent à nouveau sur le nouvel arrivant.

James poussa son cri de faucon, Alexandros rangea l’artéfact dans sa poche, le charme fut rompu. Tandis que Jaime se laissait envahir par la honte et la colère de s'être presque fait avoir, la voix de l'Ancien Ravnos résonna dans son esprit pour dire le mot : Cappadocien. Ce à quoi il répondit intérieurement, dans une pensée qui si elle avait été formulée aurait pris le ton d'un enfant vexé : Connais pas.
Jaime avait beau avoir 262 ans, il connaissait mal l'histoire vampirique des âges anciens.

L'entrée de son frère fut magistrale. La descente en piqué, suivie de la transformation, avec atterrissage devant eux avec un genou à terre, l'air sérieux comme un pape, c'était super classe. Le Ravnos eut un sourire en voyant son frère. Il savait soigner ses entrées mine de rien. Le Gangrel ne s'en rendait pas forcément compte, mais il avait un charisme certain. Un charisme sauvage, animal. Il maîtrisait à la perfection le don de transformation animale.

James n'avait cependant pas besoin de savoir lire les auras pour voir que son frère était troublé. Ils se connaissaient tellement bien que Jaime avait beaucoup de mal à cacher quoi que ce soit à James, bien qu'il soit un maître de la duperie et de la manipulation. La voix sombre du Gangrel résonna, et laissa entendre qu'il pensait que quelque chose se passait mal. Certes, souvent quand Jaime appelait son frère, c'était parce qu'il y avait du danger ou une situation délicate, généralement qu'il s'était foutu dans la merde. Mais pour une fois, c'était une bonne nouvelle qu'il avait à annoncer.
Il laissa Alexandros se présenter, avant de sourire à James et de lui mettre amicalement la main sur l'épaule.

Déstresse, ptit frère, tout va bien ! Je voulais simplement te présenter Alexandros ! C'est un puissant frère, très puissant, et il compte rester quelques temps dans les environs. Si ça ne tenait qu'à moi, je l'accueillerais à bras ouverts, mais je veux être sûr qu'il te plait avant.

Le Ravnos n'était en réalité pas si enthousiaste. Il avait une certaine admiration pour son Ancien, et était impatient d'en savoir plus sur sa quête, mais la venue d'un Pitre si puissant était rarement une vraie bonne nouvelle, surtout en un lieu de paix comme le Griffith Park. Mais il ne fallait surtout pas que le Gangrel ait des doutes sur les activités d'Alexandros. Et puis, de toute façon, n'avait-il pas dit qu'il ne comptait pas troubler l'harmonie du domaine ?

Sixième sens, instinct animal développé à force d'être transformé, oui il y avait quelques choses dans l'air, et je n'aimais pas ça. Ce n'était pas au point d'en avoir le dos tellement hérissé mais j'avouais être déjà sur le qui-vif. Juste une légère sensation le long de la colonne vertébrale. Juste … enfin bref. Le nouveau, vieux d'ailleurs pour un semblable, fit un signe avec son chapeau pour me saluer avant de dire.

- Bonsoir, Prince James Forrel. Je suis Alexandros du Clan des Gitans. Je comptais pour goûter à la notoire hospitalité des Princes de Griffith Park.

Que dire face à ça. Même si j'avais un pressentiment, je ne pouvais pas le foutre dehors. Ici, c'était un havre pour tout ceux de notre sang. Je le sentais vieux, et ça, dans un sens, ça ne me rassurait pas. C'était quelqu'un qui pouvait échapper en un instant à notre contrôle. Est-ce que j'avais peur ? Non pas réellement, juste un pressentiment …
Mais je sentis soudain la main de Jaime sur mon épaule. Dans cette situation, une autre personne aurait fait ce geste, je l'aurais certainement presque tué …
Mais lui, je reconnaissais dans un sens sa main sur mon épaule, et cela réussit à me détendre un peu même si ça ne se voyait pas. En fait, là, il n'y avait que lui qui pouvait le remarquer et le comprendre.

Déstresse, ptit frère, tout va bien ! Je voulais simplement te présenter Alexandros ! C'est un puissant frère, très puissant, et il compte rester quelques temps dans les environs. Si ça ne tenait qu'à moi, je l'accueillerais à bras ouverts, mais je veux être sûr qu'il te plait avant.

Puissant … j'avouais que moi, j'avais du mal à l'accueillir à bras ouvert et mon frère pouvait dire ce qu'il voulait, je sentais bien qu'il y avait un hic … une petite tension.
J'étais droit et après avoir lancer un regard à Jaime, je m'avançais et tendis ma main vers ce Alexandros. Je l'acceptais sur nos terres, mais ma méfiance envers lui n'était pas envolé. Je le surveillerais de loin, tant que je n'aurais pas la certitude qu'il n'était pas un danger pour nous.

-Vous êtes de nos sangs, ces terres seront donc un refuge pour nous, aussi longtemps que vous le voudrez.

Invitation sans plus d'enthousiasme. Il était le bienvenu, tant qu'il ne devait pas une menace.

Le Gangrel et le Ravnos échangèrent une poignée de main rituelle.
James ne se montra pas particulièrement enthousiaste. Rien d'étonnant. Il connaissait la Voie des Pitres, et était loin de l'apprécier, même s'il la tolérait par égard pour son frère. Le Gangrel devait se savoir protégé, néanmoins, puisque Jaime lui avait dit de nombreuses fois que les Gangrel du Griffith Park seraient dans les derniers à rejoindre le cycle, juste avant les Ravnos, bien entendu.
Quant à Alexandros, il avait dit au Prince des Gitans qu'il respectait les Gangrel, et que James n'aurait aucune crainte à avoir.

Le vieux Ravnos se proclama ravi, et pourtant son sourire en disait tout autrement. Les relations entre les deux seraient probablement tendues... Mais ils n'avaient pas à se côtoyer. Jaime s'occuperait d'Alexandros. Ils devraient de toute manière s'occuper de cette boîte maudite. Le Ravnos tenterait de maintenir James le plus à l'écart possible de tout cela. Si les deux clans vivaient ensemble, chacun s'occupait de ses propres affaires internes. Ainsi devaient aller les choses, pour préserver l'harmonie.

Un royaume bâti dans le sang, Alexandros. Mais nous comptons bien le garder à l'écart de toute lutte.

Voilà qui était dit. Le grand Pitre n'userait pas du parc comme champ de bataille pour sa lutte. Les Ravnos l'aideraient s'il en avait besoin, mais aucun conflit ne devrait éclater ici.
Après tout, Alexandros n'avait fait aucune promesse solennelle. A aucun moment, lorsqu'il parlait de ne pas briser la quiétude du lieu, il n'avait craché dans sa main, marquant selon les coutumes Ravnos un serment d'honneur.
Mieux valait donc le prévenir. Jaime n'était pas dupe.

Bien ! La nuit est bien avancée, à présent. Nous allons vous montrer les lieux où les Ravnos dorment habituellement, si vous désirez passer la journée en toute tranquillité.