Aux premieres loges [PV Ismahel Lucilius]

Comme d’habitude le Black Rattler affichait complet ce soir. Le spectacle battait son plein et les spectateurs comme des phalènes louvoyant autour de la flamme envoutante d’une chandelle, fixaient le ballet harmonieux des danseuses. Toute la représentation était exécutée avec grâce et précision, un vrai régal pour les yeux d’un humain, il restait à savoir s’il serait à la hauteur de la critique d’un Toreador.

Depuis qu’il avait reçu la missive du Primogene Toreador, le sang du prévôt, pourtant réputé aussi froid que les glaces arctiques du grand nord, s’était mis à bouillir. Quel nouveau-né ne serait pas enthousiasmé par une entrevue avec un grand dignitaire de la camarilla et surtout quel Ventrue resterait impassible devant la perspective de nouer des liens avec un représentant du pouvoir. Il fallait donc qu’il mette toutes les chances de son côté et surtout qu’il fasse bonne impression. C’est pour cela qu’il choisit la plus luxueuse des loges privées de son établissement pour cette réunion, au lieu de son bureau, jugé trop fonctionnel et sans fantaisies. À l'abri des regards et dans un confort olympien, les deux caïnites pourront discuter tout en admirant le spectacle et au besoin du bétail sélectionné par ses propres soins fournira du Vitae de bonne qualité à son invité, voire plus si affinités. Aucun détail n’avait été négligé, en tout cas il l’espérait.

Un coup d’œil à sa montre de marque, qui tenait plus de la joaillerie que de l’horlogerie, lui permit de constater que l’arrivée de son convive était imminente. La ponctualité avait toujours été une qualité appréciée par Lowell. C’était une manière de jauger ceux avec qui il avait à faire. Un peu vieux jeu comme méthode, certes, mais qui peut dire combien de désastres auraient pu éviter, si un simple horaire avait été respecté. Dans le monde de Lowell, une seconde pouvait faire la différence entre la vie et la mort. Le facteur temps ne devait jamais être négligé.

Voilà pourquoi, il s’était arrangé pour être prêt deux heures avant l’heure fixée pour le rendez-vous. Vêtu d’un costume trois-pièces de couleur sombre, taillé sur mesure par un des meilleurs artisans de la région et aussi un des plus couteux. Le prévôt attendait debout, au milieu du mobilier en bois précieux et en velours de la loge.

Quant à Mélita, son assistante, elle avait pour mission d’accueillir et d’escorter le Primogene et éventuellement sa suite jusqu’au lieu de rendez-vous. Il voulait un accueil sobre, mais raffiné, Mélita était toute désignée pour ce genre de mission. D’ailleurs, l’odorat particulier du Ventrue détectait déjà, les fragrances si particulières du corps de la jeune femme. Une odeur plus qu’appétissante pour le nouveau-né, puisque la jeune assistance avait deux émeraudes à la place de ses pupilles. Il n’était pas rare que les Ventrues s’entourent de leur bétail de prédilection, Lowell Shade ne faisait pas exception, bien qu’il restait discret. En effet, chez certains Ventrue, garder le secret sur son type de Vitae favori était une nécessité. Qui sait ce qu’un rival pourrait faire avec une telle information.

Des bruits pas se rapprochaient de lui. Tout comme les trois coups d’un brigadier dans un théâtre, ils annonçaient l’ouverture d’une scène. Il ne restait plus qu’à déterminer qu’elle en sera la fin.

Le Ventrue avait répondu avec diligence. Il le conviait à une représentation au Black Rattler. Un endroit convenable pour une réunion... Selon ses sources, Ismahel savait que ce Mr. Shade avait un goût pour l'ordre et la bonne conduite. « Essentiel pour un prévôt. »
Il avait donné une heure précise pour leur rendez-vous. Ismahel se prépara donc ne délaissant pas ses habitudes, il revêtit un juste au corps ébène qu'il accompagna d'une chemise mauve striée d'ocre. Il ajusta un jabot beige œuf, but une gorgée de ses serbes. Puis il mit sa veste de brocart byzantine pourpre et or. Rangea sa montre à gousset dans sa poche, saisit sa canne et se dirigea vers sa voiture où Vassili l'attendait lui tenant la porte. Tysha était à l'intérieur, elle ouvrit une bouteille de champagne et lui tendit une coupe ainsi que Innocentes Paroles de Tchekov. Ismahel lisait toujours lorsqu’il se rendait à un rendez-vous. Et bien qu'il eut lu déjà de nombreuses fois chacun de ses livres, il prenait un plaisir singulier à s'y replonger, se délectant de la vitae du livre comme de la prose des humains, et inversement.

Il arriva en avance et se permit donc d'attendre dans la voiture, se servant à nouveau une coupe de champagne. Arriver en avance aurait donné une impression d'empressement ou de stress, arriver en retard était bien entendu inenvisageable. Terminant quelques pages, il discuta en même temps avec Tysha des nouvelles de la journée. Puis il sortit accompagné de cette dernière ainsi que de Vassili.
Alors qu'ils entrèrent dans le Black Rattlers. Les individus qui stationnaient dans le hall, se retournèrent tous lorsqu'il fit son apparition. En effet, la scène devait être surprenante voire cocasse : des portes venaient d'arriver une masse de muscle russe aux yeux d'un bleu glacial presque blanc, une splendide jeune métisse aux cheveux de jais moulée dans une robe de bal cuivrée et ornée de centaines de perles, et surtout un espèce de marquis issu de la cour du Roi soleil, ou du moins un hurluberlu se prenant pour un tel individu. Et pourtant dans le tel désaccord qui jaillissait de ce groupe, c'était une plus une sensation de puissance, de prestance voire de royauté qui émanait d'eux. Les yeux d'Ismahel rendus violets par la lumière dorée, se posèrent rapidement au fond du regard de chacun des individus, les détaillant, se délectant de leur psyché. Jamais un visage et un esprit, une fois entrait dans le répertoire mémoriel du vampire ne pouvait espérer en partir.

L'endroit était plus agréable que dans les souvenirs du Toréador qui y était déjà allé une fois avec l'ancienne Prince de la ville, sa douce et regrettée Amelia... Alors qu'un vent de nostalgie le traversait, une charmante femme aux yeux d'un vert émeraude ravissant vint à l'heure rencontre. Elle se présenta comme Mélita, assistante de Mr. Shade, et les intima de l'accompagner jusqu'à la loge réservée par son maître. Alors qu'ils avançaient, Ismahel discuta de banalités avec la jeune dame. À première vue, au vue du niveau de la discussion, une marche silencieuse aurait aussi bien fait l'affaire. Mais le caïnite voulait en savoir plus sur ce Mr. Shade et les relations qu'ils entretenaient à Los Angeles, et c'est toujours dans les mots échangés avec désinvoltures que les secrets jaillissent. Il en apprit plus sur Mr. Shade par le phrasé, la démarche, les tics et les intonations de Mélita que par ses mots eux-mêmes. Il n'avait d'ailleurs posé aucune question mettant directement en cause Lowell Shade.

Une fois arrivé devant ce qui devait être la loge, Ismahel intima à Vassili de rester dans le secteur, il donna une carte de crédit et sa carte de visite et lui dit d'essayer de trouver une place dans une loge adjacente quel qu’en soit le prix. La culture et le coté esthétique de Vassili méritait d’être étoffé, il fallait le concéder.
Il pénétra dans la pièce en suivant Mélita, avec à son bras Tysha. La loge était, il devait l'accorder, assez belle. Elle avait été décoré avec bon goût ce qui est très rare dans une époque aussi barbare. En contre bas, le ballet semblait envoûter tous les humains. Le prévôt avait du mettre la main à la poche pour faire venir dans des délais si restreints cette troupe. Il les avait vu joué il y a quelque années à New-York. Elle ne semblait pas avoir perdu de son talent. La salle de représentation était tout à fait correcte, elle dépassait en effet de loin les standards attendus pour une salle d'un établissement comme celui-ci. Une agréable surprise...

- Mr. Lowell Shade du Clan des Sceptres, c'est un plaisir que de vous rencontrer. J'espère que cette soirée pourra nous agréer. Je suis Ismahel Lucilius Gaebius du Clan de la Rose, Primogène de la cité des anges. Voire délicate dame, cette charmante Mélita, a été d'une compagnie des plus agréables.
Mais j'en oublie mes manières. Pardonne moi mon ange. Mr. Shade, je vous présente Tysha Paulsen, mon assistante.

Si le regard de Lowell était tangible, il aurait peut-être pu arracher à la belle Tysha quelques gémissements quand il prit une fraction de seconde pour admirer ses délicieuses courbes. Le fait qu’elle était entrée au bras de son invité ne lui avait pas échappé non plus. Il ne fallait pas surtout pas que cette fraction seconde de contemplation génère une éternité d’inimitié entre lui et le Primogène Ismahel.

« On ne m’avait pas donc menti ! On retrouve bien les plus belles créations du monde au sein du clan de la Rose. »

Lowell se courba gracieusement afin de baiser la main de la naïade à la manière des aristocrates de la renaissance. Un geste parfaitement exécuté et pour cause, il avait été instruit par une noble qui avait connu cette époque. Il n’y avait pas que cela qu’il avait appris de sa Dame. La flatterie, comme ce compliment adressé à la fois à l’assistante et à son maitre faisait partie des principaux chapitres de l’enseignement d’Éleanor. Cependant, Il y avait des précautions à prendre. La flatterie était une arme à double tranchant. Elle pouvait être aussi néfaste que bénéfique, tout dépendait de l’interlocuteur. Voilà pourquoi, le prévôt restait attentif aux réactions de l’ancien.

« C’est un immense honneur et un plaisir indéfinissable de vous recevoir dans mon modeste établissement, j’espère que vous le trouverez confortable. Je vous en prie installez-vous. »

À ce moment, Mélita chuchota quelques mots à l’oreille du Ventrue. Ce dernier fronça des sourcils un instant, avant de reprendre la parole avec un ton toujours mielleux.

«Nous ferons le nécessaire pour que votre compagnon puisse bénéficier à titre gratuit de tout le confort ainsi que de tous les services de notre établissement, vous êtes mes invités. »

Sur ces mots, le nouveau-né adressa un regard à la brunette qui aussitôt s’en alla. Lowell en profita pour s’installer sur un des sièges luxueux de la loge.

« Pardonnez ma curiosité et mon manque de tact, mais bon nombre d’entre nous se posent des questions sur ce fameux conseil, celui qui a invoqué la Justice dans notre si belle ville. »

Un petit rictus involontaire, signe de satisfaction, déforma ses lèvres le temps d’un souffle. Les périodes de troubles étaient toujours bénéfiques pour les ambitieux qui savaient en tirer profit et Lowell était de ceux-là. C’était un peu comme soumettre un problème d’échec très complexe à un joueur passionné de ce jeu. Il lui tardait de bouger ses pièces afin de le résoudre.

« Aussi, consentirez-vous à me décrire les événements qui s’y sont déroulés, puisque vous en avez été un témoin privilégié. Oh, mais avant peut-être que vous voudriez boire quelque chose de frais, nous avons aussi du chaud.»

Du chaud… Il fallait entendre par là : à trente-sept degrés.

Mr. Shade semblait être un homme de bon goût d'une part il semblait apprécier une des plus belles œuvres de la collection du Toréador : Tysha elle-même ; d'autre part il semblait être rompu aux usages courtois de la belle époque. Il avait connu quelques vampires Ventrues aux mœurs encore très anciennes, attachés comme lui à la courtoisie de l'aristocratie européenne. Parmi ces vampires, il ne pouvait cité que deux italiens, les autres semblaient tous être français, sans doute des membres de la royauté ayant fui Paris et la France lorsque la révolution fit tomber la monarchie et que François Villon du Clan de la Rose s'était installé à Paris. Cela lui fit penser qu'il devrait au plus vite tenter de contacter ces amis en France mais chaque chose en son temps.

La flatterie avait toujours été l'arme du Toréador, il en connaissait l'efficacité et ses risques. Le Ventrue s'y adonna cependant, tentait-il de l'impressionner ? Ou avait-il si bien sondé Ismahel qu'il avait réalisé que son interlocuteur ne réagirait qu'en lui rendant la pareille ?
Mélita chuchota à Lowell la situation de Vassili. Bien qu'elle fit l'effort de parler aussi bas que possible, les oreilles de l'Ancilla lui rapportèrent son discours avec autant de clarté que si elle l'avait déclamé à voix haute. Ismahel fit mou de ne rien entendre et paraître la surprise lorsque le prévôt lui annonça l'amabilité dont il ferait preuve avec les gens de sa suite.

« - C'est un honneur partagé, prévôt. La Rose courbe l'échine face à la royauté de votre sympathie. J'aurai bien laissé mon homme de main dehors mais il est nécessaire que ce pauvre homme se cultive. Il fait encore parti de ces molosses au cœur tendre, au bras dur et à l'esprit lent. Votre délicieuse représentation devrait m'aider à aiguiser son esprit afin d'en faire une véritable lame.

Puis Ismahel s'installa dans le fauteuil confortable laissé libre à coté de Lowell, Tysha s’asseyant dans un fauteuil derrière lui. Elle savait qu'elle devait rester en retrait, elle n'était qu'une goule et c'était un entretien de vampire, cependant elle devait être suffisamment proche d'Ismahel pour répondre à ces inclinations.

- Pardonnez ma curiosité et mon manque de tact, mais bon nombre d’entre nous se posent des questions sur ce fameux conseil, celui qui a invoqué la Justice dans notre si belle ville.

La réunion du primogénat... ce jeune vampire était aussi curieux qu'il s'y attendait. Le propre d'un Sceptre est de vouloir diriger, avoir le contrôle et dans la ville de Los Angeles, le Primogène du Clan des Rois n'avait pas jugé nécessaire de se présenter à cette réunion. Le prévôt avait donc du recevoir la déclaration de Justice sans avoir été mis au courant par des supérieurs du clan de ce qu'il s'était passé en cette triste nuit.
Prenant quelques secondes pour répondre et cacher au mieux ses émotions quant à cette nuit, Ismahel posa un regard doux sur le ballet puis tourna son visage lisse marqué d'un mince sourire vers Lowell qui lui proposa à boire.

- La réunion du Primogénat a en effet porté en notre ville, l’intérêt d'un Justicar qui dans sa sagesse a mis sous détention notre ancienne Régente... Pour parler de troubles et de trahison, je consentirai en effet à voir quelles « boissons » pouvez vous me proposer.
Ah, tandis que vous ferez venir ces calices de chairs, pourriez-vous me faire venir aussi une carte de vos alcools ? J'aime à mélanger l'alcool et la vitae. Ne sachant encore ce que vous me proposerez, vous comprenez que je ne puis encore me décider sur l'accompagnement...

Avec ces serbes, Ismahel aimait un accompagnement de vodka. Pour les asiatiques aux senteurs de camphre, il préférait un alcool plus fort en goût tel que le rhum ou la tequila. Les africains noirs comme l'ébène se marient parfaitement avec le champagne. Les nordiques aux cheveux de feu étaient nés pour être appréciés avec du scotch. Le vin était délicieux avec les hispaniques. Tout humain est né pour être dégusté, avait-il entendu une fois lors d'une cabale à Londres, cela était tout à fait vrai. Le sang n'est pas une simple source de nourriture, il est la marque même du vampire. Sa dégustation est donc un art à maîtriser au titre similaire que tout autre.

Une beauté extraordinaire à son bras, un titan a l’allure intimidante qui veillait dans son ombre. Le Primogène savait s’entourer. Si la loge était un échiquier on aurait pu le comparer à un roi escorté de sa reine et de sa tour et en ce moment, le prévôt se demandait bien quelles étaient les autres pièces que le Toréador avait à sa disposition et surtout comment il les utilisait. Avec finesse et élégance ou avec force et férocité, peut-être même un mélange de tous les styles, une main de fer dans un gant de velours. Décidément, cette réunion venait de commencer, mais elle s’annonçait déjà très fructueuse.

Avant d’aller plus loin dans la discussion, Ismahel accepta l’offre de Lowell et fit une requête particulière. Le Ventrue sourit à l’évocation du mélange de Vitae et d’alcool. Ceux du clan des sceptres mieux quiconque connaissaient l’importance du choix du bon calice. Les exigences d’un ventrue en matière de sang étaient légendaires, on racontait même que certains d’entre eux sont entrés en torpeur faute de trouver leurs Vitae de prédilection.

« Je pense que vous ne serez pas déçu par notre sélection. »

Lowell mit la main dans la poche intérieure de sa veste et appuya sur ce qui semblait être un biper. Au même moment Mélita fit son entrée dans pièce, ce qui implicitement annonçait qu’elle avait accompli sa mission. L’homme de main du Primogène devait apprécier le spectacle, à moins qu’il ne soit trop occupé avec « l’hôtesse » que la brune avait mise à sa disposition.

« Mais pour revenir à notre histoire vous devez être rassuré en quelque sorte de la décision du Justiciar. Amélia Queen n’est que prisonnière et non exécutée, la justice a la réputation d’être plus expéditive quand il s’agit de trahison. Il y a donc de l’espoir. »

La dernière phrase du nouveau-né n’était évidemment pas sincère et une oreille exercée pouvait facilement le discerner. La dernière chose qu’il souhaitait était que la Toreador reprenne son poste, surtout quand le prince « intérimaire » était un Ventrue. L’idéal serait que le trône reste aux Ventrue, les seuls aptes à guider les damnés dans ce monde, et si possible que sa situation s’améliore. Alors qu’il approchait bientôt de sa centième année de non-vie, il lui tardait de recevoir une nouvelle promotion. Mais pour cela, il devra encore manœuvrer en douceur et laisser la situation se décanter un peu.

La porte de la loge s’ouvrit et quatre jeunes gens, deux hommes et deux femmes entrèrent dans la pièce. Ils ne devaient pas avoir plus de vingt-cinq ans et leurs physiques parfaits permettaient de deviner qu’ils étaient bien nourris et bien entretenus afin de garantir la pureté et la qualité de leur Vitae. La première femme était une sculpturale mulâtresse à la peau dorée qui sentait encore les épices de Cuba, son ile natale, elle répondait au nom de Ginger. L’autre était une blonde aux cheveux aussi brillants que des filaments d’or qu’on trouvait dans le sol de la Californie, elle se nommait Sandy. Elles étaient toutes les deux vêtues de robes de soirée qui soulignaient agréablement leurs silhouettes. Quant aux deux hommes, le premier, Fernando, un brun ayant quelques traits hispaniques, semblait avoir été taillé dans le marbre par Michelangelo lui-même. C’est lui qui poussait un chariot rempli d’alcool venant des quatre coins du monde. Pour finir il y avait Clifford et sa longue chevelure châtain clair, il était le plus jeune du quatuor. Ses membres fins et son visage angélique lui donnaient une allure androgyne.

« Faites votre choix, mon ami et ensuite on parlera de cette fameuse trahison…Si vous le voulez bien. »

Et ce choix incluait aussi Mélita. Ça ne l’enchantait pas que quelqu’un se serve dans son si précieux calice, mais la quête du pouvoir demandait bien quelques sacrifices.

« Faites votre choix, mon ami et ensuite on parlera de cette fameuse trahison…Si vous le voulez bien.

Lowell venait de faire venir quatre calices en plus de Mélita, la jeune femme devant être son calice personnel bien qu'il ne l'eut pas préciser. Chose intéressante d'ailleurs. Les Ventrues aiment avoir Leur calice personnel, un calice naît d'un choix très précis, presque scientifique, un choix spécifique, spécial et surtout essentiel. L'absence de précision signifiait qu'il était prêt à laisser le Toréador goûter son Bien. Ce Lowell voulait réellement que leur affaire fonctionne... le Toréador fut tenter de goûter à ce met si bien garder mais il était inutile de se mettre ce bon prévôt à dos.
Cependant l'envi l'en démanger grandement... le prévôt avait simulé la compassion pour le cas d'Amelia Quinn et bien qu'il était compréhensible qu'un jeune vampire dans une telle situation se régalait à l'idée d'une ascension au sein de la Camarilla, la remarque gêna quelque peu la Rose qui n'en fit rien paraître, préférant sourire et le remercier de son soutient.

L'hispanique au teint marmoréen tirait le chariot d'alcool. Le caïnite observa longuement les alcools puis huma l'air à plein poumons. L’hispanique se marierait très bien avec le Bordeaux mais la blonde semblait avoir un sang de qualité correcte pour la délicieuse vodka qui trônait sur le chariot. La belle métisse se marierait agréablement avec le champagne quoi que le rhum semblait tout indiqué pour elle. L'androgyne devait se déguster sans accompagnement...

Ismahel saisit un verre Old Fashioned, il y déposa une tranche de citron vert, deux glaçons les recouvrit de vodka puis demanda à la blonde de s'approcher. Il l'a fit s'asseoir sur ses genoux, saisit son avant bras, y déposa un baiser, un second... au troisième il inséra délicatement une canine dans sa veine. Puis d'une douce pression fit couler le sang dans le verre. Une fois son cocktail fait, il se piqua le pouce et étala doucement la goûte de son sang sur l'entaille de la blonde. Il l'a fit se lever, saisit deux verres à shots, les remplit à moitié de rhum puis demanda à la belle métisse de s'approcher et dit :

- Prendrez vous avec moi un petit verre à la santé de notre future amitié ? Je pense que le sang de... vous l'avez appelé Ginger n'est ce pas ? Donc le sang de Ginger devrait convenir avec votre délicieux rhum. Puis se tournant vers Tysha, il lui souffla. Tu devrais te servir Clifford, ne le dilue pas, il devrait être particulièrement savoureux. Faisant de nouveau face à Lowell, il s'excusa : Pardonnez moi mais je pense que Tysha va avoir besoin de se nourrir, cela fait bientôt plus d'une journée que cette charmante créature ne l'a pas fait.

Buvons à notre santé. Puis discutons du passé sinistre afin de mieux appréhender le futur qui je l'espère sera glorieux. »

La vie au sein de la Camarilla était une partie d'échec. Il devait renforcer sa dame et surtout s'ajouter un nouvel élément à ses troupes. Lowell serait-il un fou, une tour, un simple pion ? Ou serait-il un roi qui avance lui même ses troupes ?

C’était donc ainsi que le primogène consommait le Vitae, en le mélangeant avec de l’alcool. Lowell avait déjà croisé le chemin de vampires qui se nourrissaient de drogués, uniquement pour ressentir les effets des produits stupéfiants. La méthode d’Ismahel était plus noble, plus classe et surtout plus hygiénique. Elle nécessitait un sens du gout très développé et une longue expérience afin de pouvoir combiner le bon alcool avec le bon sang, hélas, Lowell ne pourra vérifier si le fluide sanguin de la charmante Ginger fusionnerait bien avec le concentré de soleil liquéfié dans son verre. C’était dommage car cette Antillaise était appétissante…dans tous les sens du terme, mais elle ne correspondait pas aux critères ultrasélectifs du prévôt.

« Il ne faut surtout pas vous excuser voyons ! Les calices sont là pour nous nourrir.»

Un trait de pensé un peu sabbatique diront certains et peut-être qu’ils n’auraient pas tort. Le monde selon Lowell était divisé en deux. D’un côté les humains, de l’autre les vampires. Les premiers avaient comme unique finalité de servir les seconds, cependant contrairement aux préceptes violents de la main noire, le règne des caïnites devait se faire dans l’ombre, de façon omnisciente et subliminale.

« Alors nourrissons-nous ! »

À ces mots Mélita s’approcha de son maitre et lui présenta son avant-bras nu. Contrairement au Toreador, le Ventrue ne fit pas preuve de douceur, quand il planta avidement ses crocs dans la peau blême de la brune. Cependant au petit râle que la jeune femme laissa échapper et surtout à la teinte rougeâtre de ses joues qui trahissaient une augmentation brutale de sa température corporelle, on pouvait déduire que le traitement ne lui déplaisait pas.

« Vous me voyez navré de ne pas pouvoir essayer votre suggestion, mais le feu hérité des ancêtres siciliens de ma petite Mélita, devra sans doute se marier avec celui de ce rhum. Par contre je serais votre obligé, si vous pouviez garder ce petit détail pour vous. »

La nationalité de Mélita n’était pas le problème, il avait juste fait mention des origines siciliennes pour faire diversion. Le sang de l’Italienne finit de remplir le verre, il semblait aussi précieux qu’un rubis qu’on venait d’extraire des profondeurs de la terre, aussi envoutant que les lèvres d’une femme, aussi tentant que le fruit du savoir lui-même. Lowell prit le soin de déposer une goutte de son sang sur la morsure, avant de récolter le fin trait écarlate qui s’était dessiné sur le bras de la jeune femme avec sa langue.

« Donc buvons à nos ou plutôt notre futur glorieux ! » Déclara-t-il en levant son verre

On y était ! Lowell passait à l’offensive en faisant subtilement allusion à un hypothétique futur en commun, ce qui laisse entendre qu’il proposait une alliance. L’audace n’était pas une denrée rare chez ce vampire, ni le toupet en quelque sorte. D’autant plus que son assurance était renforcée par la visite de son ainé. Ce dernier n’avait pas fait tout le chemin pour discuter cocktail.

« Donc buvons à nos ou plutôt notre futur glorieux ! »

Une alliance donc... Ismahel sourit à ces mots et but un shooter de rhum et de sang de Ginger. Le mélange le revigora délicieusement. Le plaisir d'être invité par un Ventrue est que ces gens là savent divinement bien choisir les calices. Un art à tout point de vue...
La belle Mélita était donc Son calice. Une information capitale sur un Ventrue que de connaître son calice... brûlez les notes d'un Tzimisce alors qu'il a mis des siècles à les amasser et vous lui portez un coups fatal, brûlez la collection d’œuvres d'un Toréador et vous le brisez, brûlez le calice d'un Ventrue et vous le mettez à mort...
Mais pour le moment, il n'en était nullement question. Pour le moment, la partie ne réclamait que l'on sacrifie un tel Cavalier. Le Toréador but une gorgée de vodka puis dit :

« - Vous me mésestimez très cher. Avec moi votre secret est bien gardé. Bon donc la réunion du Primogénat... ce fut instructif, disons que nous sommes tombés en désaccord sur le choix du Prince en ce qui concernait un sabbatique se disant repenti. Le problème s'est posé lorsque l'ancien Primogène du Clan de la Sagesse s'est mis insulter le Prince ainsi que tous ceux qui étaient en sa présence. Une chasse au sang a été déclaré cependant le Prince n'a pas prit en compte nos désirs de punir le sabbatique pour ce qu'il était. L'erreur principale dans cette affaire est que nous ne nous écoutions pas, chacun cherchant des faiblesses dans les paroles de l'autre sans tenter de trouver un compromis. Mais l'affaire est close et un régent va bientôt se présenter. Un régent de votre d'ailleurs... le connaissez vous ?

Voilà la question capitale. Si le Ventrue avait des contacts avec le futur régent, il devenait une « Reine » et non un simple Cavalier. Mais il y avait peu de chance qu'un jeune vampire comme lui eut connaissance d'un Ancien comme Nathanael Pearson...
Amélia avait vraiment tout détruit. Leur plan si longuement travaillé... le Clan de la Rose avait perdu sa domination sur Los Angeles, il avait perdu un Ancien, il avait été sali... Une fois de plus la Rose s'inclinerait devant le Sceptre, cette idée bien que déplaisante était nécessaire.
Il fallait donc s'assurer l'amitié des Sceptres de la ville et trouver une nouvelle stratégie.
La politique au sein de la Camarilla était une partie d'échec... et perdre sa Dame au début de la partie est signe d'une défaite prochaine... il lui fallait absolument trouver une nouvelle Dame avant que les événements ne se précipitent.

Il posa son regard sur le public, puis sur les artistes, buvant une nouvelle gorgée. Alors que ses yeux voguaient sur les individus dans les loges, il vit un visage familier... une très ancienne connaissance... un individu qu'il avait connu alors qu'il était prévôt des terres de Valence en France.
Philippe ? Encore vivant... Qu'est ce que tu fais ici ?
Alors qu'il le fixait, le vieil homme le regarda, son regard était toujours aussi bleu, aussi clair mais il y avait quelque chose de froid, de dur désormais... il lui sourit et le salua d'un geste de la main puis reprit se qu'il faisait. Puis il revint à sa conversation avec le Ventrue.
Je pers ma Dame, je rencontre un Cavalier et voilà que je trouve un ancien pion qui désormais doit être une Tour... l’échiquier qu'est ce monde bouge vite... très vite... soyons à la hauteur.

- Pardonnez moi, j'ai aperçu une ancienne connaissance dans la loge d'en face. C'est un habitué ? »

Il y avait des informations importantes dans le récit que venait de faire Ismahel. Tout d'abord , il venant d'en apprendre un peu plus sur le primogène Brujah. Un vampire pouvant s'opposer au prince, même s'il occupait lui-même de hautes fonctions dans la hiérarchie camariste, n'était pas à prendre à la légère. Il n'y avait que trois raisons qui pouvaient justifier un tel comportement, soit il était fou, soit il n'avait rien à perdre ou soit il avait des atouts bien dissimulés dans sa manche, dans tous les cas, l'intuition du prévôt lui ordonnait de garder à l'œil cet ancien. Quelle que soit l'option envisagée, le représentant du clan de la sagesse restait dangereux, il devait juste évaluer le degré de cette menace. Un entretien avec Marc S. Raynor, s'imposait car le meilleur moyen de vérifier si un fauve mord est tout simplement de mettre la main devant l'entrée de sa tanière.

L'autre information qui était fournie par le représentant de la rose était la désunion apparente du primogènat. Cette nouvelle fut aussi douce que le sirupeux vitae de la belle Mélita qui coulait dans sa gorge. Cette discorde pourrait bien arranger ses affaires. Uni le primogènat constituait un contre-pouvoir à l'autorité du prince. Désuni, il était aussi intimidant qu'une nuée d'abeille protégeant sa ruche d'un ours affamé, autant dire inefficace. S'il s'y prenait bien, le régent pourrait en tirer avantage et lui aussi.

En parlant de régent, Ismahel questionnait de façon assez habile le nouveau-né sur sa relation avec le futur maitre de Los Angeles. Voilà une question plus que légitime et dont la réponse allait surement conditionner le cours des événements.

"Je ne connais pas personnellement monsieur Pearson, hélas !"

Les relations entre Ventrue étaient plus que complexe. Les anciens évitaient de se mélanger aux jeunes, surtout quand ils avaient les dents aussi longues que celles de Lowell.

"Mais je compte bien remédier à cela, croyez-moi !"

Le jeune vampire, reprit une gorgée du fluide sanguin issu des veines de l'Italienne et resta pensif tout en observant le regard échangé entre le Toreador et un spectateur. Il ignorait que ces deux la se connaissaient et comme on pouvait s'y attendre, le sang-bleu mourrait d'envie de connaître quel lien les unissait.

À la seconde question du Toreador, il s'empressa de répondre.

"Pas vraiment, pour dire la vérité, Philippe aurait dû être à votre place ce soir, mais après avoir reçu votre missive, je ne pouvais qu'annuler son rendez-vous . "

Un coup de brosse à reluire ne pouvait pas faire de mal et s'il le fallait encore, Lowell montrait une nouvelle fois à quel point ce rendez-vous était important pour lui.

"une amie très chère me l'a recommandé comme partenaire dans l'optique d'une future acquisition immobilière en Europe. Je me devais au moins de le recevoir ici, cependant j'espère que sa présence ne vous importune pas. Car dans ce cas je pourrais toujours tenter de trouver un compromis, entre lui, vous et moi afin que tout le monde soit d'accord, chose qui , hélas ne fut pas le cas lors du dernier conseil"

Lowell prouvait bien qu'il méritait son surnom de "Rattler". À la manière d'un serpent, il sifflait à l'oreille de l'ancien, qu'il aurait pu réussir la ou le primogénat a échoué. Avec un certain culot, il insinuait qu'il pouvait faire un bon primogéne voire plus. Il ne doutait de rien, ce nouveau-né et c'était bien cela qui faisait sa force.

"Je peux aussi l'inviter à nous rejoindre .Vous êtes chez vous ici après-tout"

Le Primogène avait consciemment avoué à Lowell la faiblesse du Primogénat, le « jeune » vampire devait se pourlécher les babines. Pourquoi avouer sa faiblesse à un concurrent de l'échiquier politique ? Pour en faire un allier bien entendu, une place de Primogène du clan des Rois manquait à Los Angeles, et devenir un soutient officiel de Lowell serait sans doute une aide précieuse pour lui lorsqu'il rencontrera le Primogénat, si le prévôt devait devenir membre de cette auguste assemblée. Il fallait déplacer lentement ses pions afin d'atteindre le sommet.
Un esprit vif comme Lowell saurait récompenser ceux qui l'auraient fait gravir les échelons. Il manque aussi un Primogène Brujah puisque Ser Raynor est encore chassé au sang... Espérons que le Prince enlève la chasse de sa tête, cependant il serait préférable pour le Primogénat de ne plus le voir en cette assemblée...

Cependant ce n'était pas l'échiquier politique de la Camarilla qui troublait Ismahel au point qu'il s'arrêta de boire. Philippe, ce Ravnos anarch était à Los Angeles et n'avait pas eu la bienséance de se présenter à l'Elyseum. Aurait-il perdu ses bonnes manières ? Ou ne souhaitait-il pas être connu ? Mais alors pourquoi se montrer ostensiblement ici ? Pourquoi faire des affaires avec le prévôt ?
Et ce regard... ce regard de glace, ce regard si froid qu'il lui avait lancé. Malgré le sourire qui l'accompagnait, ce regard avait tétanisé le Primogène sur l'instant.

-"Une amie très chère me l'a recommandé comme partenaire dans l'optique d'une future acquisition immobilière en Europe. Je me devais au moins de le recevoir ici, cependant j'espère que sa présence ne vous importune pas. Car dans ce cas je pourrais toujours tenter de trouver un compromis, entre lui, vous et moi afin que tout le monde soit d'accord, chose qui , hélas ne fut pas le cas lors du dernier conseil.

Il flattais Ismahel tout en rappelant l'échec du Primogénat dont il faisait parti. Habile... Cependant ce n'était pas cela dans la phrase du vampire qui intéressa le Toréador. Cette « amie très chère », il fallait découvrir qui elle était. Cela ne sentait pas bon... L'Augure du vampire lui indiquait des stris noir sur l'aura du vampire, une aura puissante, surpuissante... Qu'est ce qu'une amie du prévôt peut bien faire avec un diaboliste Ravnos ? Dans ses souvenirs Philippe n'était pas diaboliste, uniquement un anarch nodiste sans grande dangerosité.
Ismahel ne devait pas faire part de ses doutes au jeune prévôt. Il sourit à l'attention de Lowell :

- C'est bien aimable à vous mais ne vous donnez pas cette peine. Il ne me gêne en rien. Non laissez le profiter du délicieux spectacle que vous nous offrez. Je ne suis pas là pour parler à cette vieille connaissance mais avec vous.

Placer un jeune vampire comme Lowell Shade au-dessus d'un vampire comme Philippe qui devait avoir au moins cinq siècles, lui passerait du baume. Leur entretient ne devait souffrir l'intervention d'une vieille connaissance, surtout qu'Ismahel redoutait ce petit pré-sentiment qui naissait dans son esprit. « Il n'est pas venu pour faire des affaires immobilières... ce sourire et ce salut de la main ne signifiaient pas bonsoir mais... à bientôt, j'en suis certain... »

- Vous avez donc des affaires immobilières en Europe ? Quel est votre contact ? J'ai moi aussi des biens en Italie et en France, si votre contact a toute votre confiance alors je sais où je pourrai y placer la mienne... il est si rare d'avoir des amis auxquels on puisse confier sa vie. »

« On ne peut pas encore appeler cela affaire. Disons plutôt que je profite un peu de la crise qui secoue le vieux continent pour faire quelques petits investissements, que j’espère vont plus tard être fructueux. »

Ce même modèle pouvait s’appliquer à la Camarilla. Quoi qu’on dise, la perte brutale d’un prince l’avait plongé dans une crise, certains malins voyaient donc le moment propice pour faire quelques investissements et bouger quelques pions.

« Par contre pour ce qui est de mon contact, je crois que je vais jalousement garder son identité secrète, elle risquerait d’être séduite par votre charme et de me délaisser. »

Un sourire carnassier se dessina sur ses lèvres, suivit d’un petit ricanement.

« Non en fait, c’est juste que je ne peux la mettre en contact qu’avec de vrais partenaires, c’est ainsi qu’on fait dans notre milieu et c'est à cause de sélectivité que j'ai gagné sa confiance et qu'elle a eu la mienne. »

Que fallait-il entendre par « vrai partenaire » ? Tout simplement un associé avec lequel il aurait conclu une affaire et surtout qui ne représentait pas une menace pour le prévôt et ses autres "associés". Pour l’instant, le jeune vampire avait fait plusieurs appels du pied, plus ou moins discret, mais hélas, il ne percevait pas vraiment de signe encourageant, juste des réponses neutres et prudentes, à moins qu’il ne savait pas les décoder. Le contraire aurait été étonnant, quelqu’un comme Ismahel ne pouvait pas s’associer à un jeune loup comme Lowell sans peser le pour et le contre, d’autant plus que pour l’instant, il n’avait rien à proposer à l’ancien. Enfin c’était avant que ce dernier s’intéresse brusquement à ses activités en Europe. Avant qu’il n’aperçoive cette vieille connaissance.

Le ventrue observa une nouvelle fois ce mystérieux personnage, son regard acéré le scrutait de pied en cap et lui aussi s’interrogeait sur les raisons qui justifiaient la venue de ce vampire en Californie. Pourquoi avait-on tant insisté pour qu’il le reçoive. Ces questions devront trouver une réponse, il en allait de sa survie.

« J’espère que vous n’êtes pas vexé, cependant je crois qu’une solide amitié et qu’une confiance mutuelle ne peuvent exister sans sincérité. »

En disant cela son regard croisa la Vénus métisse qui avait accompagné le Toreador. Ces pupilles étaient dangereusement attirées par le corps de cette femme, tels deux phalènes aux ailes sombres hypnotisés par la flamme dorée d’une bougie. Une attitude dangereuse qu’il tenta d’extérioriser en plongeant ses canines dans la chair douce de l’avant-bras de la délicieuse Mélita pour en extraire une gorgée de son sang chaud.

« C’est peut-être un peu naïf, surtout après ce qu’a provoqué la sincérité de notre ancien Prince. Vous avez une plus longue expérience de la Camarilla que moi, j’aimerais avoir votre opinion sur le sujet. Deux caïnites peuvent-ils être sincère l’un envers l’autre ? »

Lowell avait sa propre définition du mot sincérité, elle ressemblait étrangement à celle du mot comédie. Il ne devait pas être le seul au sein de la Camarilla à confondre les deux termes. Par contre le nouveau-né aussi fourbe qu’il pouvait être croyait en l’honneur et quand il rencontrait quelqu’un digne de cet honneur, alors le mot sincérité prenait sa vraie définition.

Depuis sa loge, Phosphoros observait la salle où l'on avait un aperçu micro-social de Los Angeles. Ou du moins de la crème de la ville. Le ballet était charmant, le cadre agréable, seule l'annulation de son rendez-vous avec le prévôt Ventrue avait donné un goût amer à sa soirée ; cependant, alors qu'il commençait à s'ennuyer, il aperçut aux cotés de M. Shade une vieille connaissance.
Un jeune dandy vêtu de pied en cap comme un aristocrate du dix-huitième siècle apparut. Dès que ses yeux se posèrent sur lui, Philippe réagit comme sorti de son sommeil, happé par un intérêt à la vie d'Alexandros. Cela faisait en effet, depuis le réveil de Narot que Philippe avait cessé toutes réactions. La mort du Sage et les exactions de Narot l'avaient en un sens plongé dans un profond sommeil.
En voyant le Toréador, il "reprit du service" dans l'esprit déjà bien rempli de Phosphoros.
Il voulait envoyer un message télépathique au vampire mais Jean-baptiste comme Alexandros l'en dissuadèrent lui faisant remarquer que cela n'était pas prudent. En effet, bien que le prévôt fut jeune, rien ne pouvait indiquer qu'il ne fut pas lui non plus pratiquant de l'Augure. Un salut de la main fut donc tout ce qu'il put obtenir.

Si Philippe souhaitait que ce geste fut conviviale et poli, Alexandros le fit dans une toute autre intention. Il devait instaurer un climat d'oppression sur les camaristes. Un climat qu'un Ancien Toréador et un prévôt Ventrue sauraient sans mal distiller.
Il rédigea sur un morceau de papier issu de son bloc note, une petite lettre à leur intention et la leur fit parvenir, une lettre mêlant réalité et fiction afin de rester dans les bonnes grâces des camaristes, son masque ne devait pas tomber si vite... Puis il se leva et partit, il avait un rendez-vous qui ne saurait être manqué... [suite voir RP avec Eléanore Byron]

[Ci-dessous la lettre que recevront Lowell et Ismahel]

Bonsoir messieurs, je tiens par cette lettre vous confier mes sentiments les plus distingués et porter à vos oreilles des informations capitales que j'ai récolté durant mes voyages. Je suis comme M. Shade le sait, un propriétaire terrien important en Angleterre comme en France. Dans le cadre de mon travail, j'ai appris qu'un certain Phosphoros, terrible illusionniste, Ravnos anti-tribu et dangereux diaboliste, aurait été dirigé sur la Cité des Anges. En tant qu'Aubain je n'ai que faire de votre guerre mais la perte de partenaires commerciaux m'indispose cependant. Prenez donc cette information en gage de ma bonne foi. Et comme vous dîtes vous autres camaristes : Pax Noctis

« C’est peut-être un peu naïf, surtout après ce qu’a provoqué la sincérité de notre ancien Prince. Vous avez une plus longue expérience de la Camarilla que moi, j’aimerais avoir votre opinion sur le sujet. Deux caïnites peuvent-ils être sincère l’un envers l’autre ? »

La question fit sourire l'Ancilla. La sincérité était un luxe que peu de politiques expérimentés pouvaient s'offrir. Et bien que Lowell Shade fut un nouveau-né, Ismahel n'était pas encore de ces vampires trop arrogants pour ne pas reconnaître le talent chez leurs cadets. Jusqu'à peu, Ismahel pouvait se tarder d'entretenir deux relations d'amitié profonde et sincère : Sergio et Amélia. Hélas, la seconde s'était révélée n'être qu'un mirage... Faire une confiance totale à un vampire était désormais peu envisageable...

"- Je pense que malgré les intrigues politiques inhérentes à toute organisation sociale hiérarchisée, deux camaristes peuvent entretenir une amitié sincère tant que celle-ci ne repose pas sur un rapport de supériorité ou de dette.

Une fois de plus, la réponse se devait d'être conciliante, amicale et cependant à double sens. Lowell pouvait trouver un ami en Ismahel mais il devait pour se faire ne rien attendre de lui. Une amitié ne devait être intéressée. En apparence du moins...
Les Toréadors étaient les spécialistes des fausses amitiés, des sincérités intéressées, des jeux de cours... Et comme tout Toréador, Ismahel collectionnait déjà les "amitiés" qu'un esprit objectif désignerait de mentorats. Lowell Shade désirait-il un mentor ? Un ami ? Ou plus vraisemblement un allié pouvant faire pencher la balance de son coté lorsqu'il postulerait à un poste plus grand que celui de prévôt ?
En ce cas, il avait choisi en Ismahel l'allié qu'il lui fallait. En effet, la Cité des Anges pullulait encore de membres de la Rose qui avaient accompagné Amélia ou qui étaient allés la rejoindre. Désormais c'était le Primogène qui était le général de ce bouquet flamboyant plein de parfums et d'épines.

- J'apprécie énormément votre conversation, Lowell, vous permettez que je vous appelle par votre prénom ? J'ai coutume à laisser les civilités au placard lorsque je m'adresse à mes amis...

Ils furent alors coupés, un billet avait été envoyé à leur intention de la part de cet Alexandre, ou plutôt Philippe selon la mémoire du Primogène.

Bonsoir messieurs, je tiens par cette lettre vous confier mes sentiments les plus distingués et porter à vos oreilles des informations capitales que j'ai récolté durant mes voyages. Je suis comme M. Shade le sait, un propriétaire terrien important en Angleterre comme en France. Dans le cadre de mon travail, j'ai appris qu'un certain Phosphoros, terrible illusionniste, Ravnos anti-tribu et dangereux diaboliste, aurait été dirigé sur la Cité des Anges. En tant qu'Aubain je n'ai que faire de votre guerre mais la perte de partenaires commerciaux m'indispose cependant. Prenez donc cette information en gage de ma bonne foi. Et comme vous dîtes vous autres camaristes : Pax Noctis

Durant les combats qui avaient ensanglanté les rues de la ville, les raclures sabbatiques avaient à plusieurs reprises confessé l'arrivée d'un terrible membre de la Secte. Cependant aucun n'avait cité son nom... Philippe/Alexandre avait été disposé à le leur révélé... Qu'attendait-il d'eux ?

- Avez-vous eu ouï dire de ce "Phosphoros", mon ami ?" Dit-il à l'attention de Lowell Shade.

La réponse du Toréador était cohérente et crédible, elle faisait penser un peu aux préceptes humanisme de certains philosophes. L’abolition des rapports de forces était effectivement une des conditions premières à l’installation d’une réelle amitié entre deux personnes. Le problème c’est que Lowell connaissait très peu de vampire prêt à abandonner ce rapport. En langage politique amis était souvent associé à débiteur ou créancier, c’était un moyen efficace de se prémunir contre un rival ou d’atteindre un objectif, mais il ne fallait surtout pas commettre l’erreur de croire qu’il était infaillible, car le meilleur moyen d’effacer une dette était de simplement faire disparaitre son créancier. En tous les cas, les choses étaient claires maintenant. Lowell avait bien compris que pour le moment, il ne devrait rien attendre du primogène et que la réciproque devait surement s’appliquer à sa personne.

Lowell hocha la tête en guise d’acquiescement à la première question de son invité, signifiant par la même occasion qu’il validait la définition « d’amis sincères » énoncée plus tôt… pour l’instant. Cette conversation ne prenait pas vraiment la tournure qu’il voulait, mais le prévôt l’appréciait quand même. Hélas, une inquiétante nouvelle parvint à la loge, et quelle nouvelle. L’arrivée d’un Sabbatique à Los Angeles et d’après la teneur de cette note, il s’agissait d’une pointure.

« Phosphoros... »

Pensif le caïnite observa le public qui contemplait les derniers mouvements du ballet, pour constater que Philippe avait disparu. Étrange, normalement ce genre d’informations se marchandait. Lowell ne pouvait pas non plus croire en un gage de bonne foi. C’était trop évident pour ne pas suspecter une machination, il était prévôt, sa fonction le lui imposait.

« Certains sabbatiques ont bien parlé de l’arrivée de renforts, je suppose qu’il devait faire référence à cet épouvantail, mais l’auteur de ce message semble croire qu’il est capable de nous exterminer. »

Le prévôt ricana avec ironie en relisant le message.

« Phosphoros…hum, ce nom désignait bien l'étoile du matin, il me tarde de donner une signification à ce patronyme ridicule, en lui permettant d’apprécier l’aube une dernière fois. »

Le faux ton humoristique du vampire, masquait très mal la colère qui couvait dans son esprit. Il avait pris cet avertissement pour une menace et aussi pour un défi. Le genre de choses qui avait tendance à le stimuler. Réalité ou mythe, ce diaboliste était devenu la cible d’un prévôt ambitieux et très déterminé.

« Ce Philippe est quand même surprenant, il arrive à avoir des informations que même les meilleurs espions de la Camarilla ignorent, il mérite mon attention ! C’est aussi un de vos amis. » Demanda-t-il en mimant les guillemets avec ses doigts. « Que pouvez-vous m’en dire ? »

Et là ce n’était pas l’ami qui parlait, mais le prévôt de la Camarilla. Si ce que disait la note était vrai, alors ce Philippe était en contact avec des informateurs qui intéressaient Lowell. Il lui fallait cette source.

Une pointe de déception était apparue en Lowell lorsque ce dernier avait compris qu'il ne pourrait pas facilement utiliser la Rose dans ses projets de grandeur [Utilisation d'Auspex afin de ressentir les émotions]. Bien que le prévôt était pour le Primogène un individu tout à fait charmant aux convenances agréables et à la conversation intéressante, il était nécessaire que le jeune roi n'oublie pas qu'il était en présence d'un individu qui avait entre ses mains toute la société de la Rose de Los Angeles. Société bien qu'amputée de son Ancien en la personne d'Amélia, était toujours majoritaire en cette ville.
S'il voulait bénéficier des largeurs d'Ismahel, cela serait par la voie de la gratitude et donc en lui rendant service et non l'inverse. Ce retournement de situation avait été habilement perçu par le Sceptre dont l'esprit jeune était cependant aiguisé à l'art de la politique.
« N'oublies jamais ta place, n'oublies jamais ton âge, n'oublies jamais ton Clan et surtout n'oublies jamais que tu es mortel... » Tels avaient été une fois les mots de son Sire Severus alors qu'ils traversaient la France. « N'oublies jamais que tu es mortel... » Bien que le temps n'eut pas d'effet sur son corps, tout caïnite ne devait pas oublier que la Mort Véritable pouvait l'attendre au bout du tournant. Et les Camaristes étaient tout aussi efficace pour la donner à l'un des leurs que les Sabbatiques, si les Lois et le Respect de la Camarilla étaient enfreints.
Ainsi jamais le Toréador n'avait oublié sa mortalité, sa faiblesse, sa place... et c'était son devoir de l'apprendre au plus jeune comme Lowell.
Pour autant la Rose ne voulait pas froisser un allié précieux et qui plus est une personne intéressante. Alors qu'Ismahel allait nuancer ses propos et faire renaître l'espoir dans le cœur du prévôt la lettre tomba.

« Phosphoros…hum, ce nom désignait bien l'étoile du matin, il me tarde de donner une signification à ce patronyme ridicule, en lui permettant d’apprécier l’aube une dernière fois.

La déception avait place à la colère. Le prévôt avait rangé sa vanité, c'était désormais son devoir qui était atteint. Il allait sans doute lancer ses sentinelles à la recherche de ce Phosphoros. Il aurait besoin aussi des troupes du Régent et d'un Fléau. Ce Phosphoros semblait dangereux mais ce qui tracassait au plus haut Ismahel c'était Philippe et son regard de glace. Il n'est plus le même je l'ai ressenti... Et doucement se mit à croître l'idée que Philippe, étymologiquement l'amateur de chevaux, pourrait être devenu Phosphoros, celui qui porte la Lumière.
Un cavalier destructeur qui porte le message de Dieu... ce pourrait-il que nous soyons confrontés à un cavalier de l'apocalypse ?..
Il devait confier une part de ses craintes au prévôt mais surtout en parler avec le Régent et contacter Sergio à Florence ainsi que ses contacts à New-York. Les têtes pensantes du Clan de la Rose sauraient peut-être quel lien unissait Philippe et Phosphoros.

Ce Philippe est quand même surprenant, il arrive à avoir des informations que même les meilleurs espions de la Camarilla ignorent, il mérite mon attention ! C’est aussi un de vos amis. Que pouvez-vous m’en dire ?

Le prévôt parlait désormais. Désormais son statut de Primogène ne valait rien, il s'énonçait dorénavant à la Justice de la Camarilla en la personne de ce jeune Roi.

- Philippe était un ami que j'ai connu aux alentours du XVIème siècle en France dans la province de Valence dont j'étais alors le prévôt. C'était un Anarch Ravnos déjà âgé de deux siècles au moins. Il avait parcouru l'orient à ce que j'avais compris. C'était un fervent pacifiste et humaniste. Mais je dois vous avouer mes craintes, en croisant son regard, je n'y ai pas trouvé la bonté qui y résidait mais plutôt une froideur extrême, un détachement absolu comme si toute cette humanité qui l'avait un temps empli, avait disparu. Je n'ose croire ce que je vais dire mais... peut-être Philippe en sait plus que nos meilleurs Masques car il est désormais du coté des démonistes...

Une vague de colère sourde perturba l'esprit cartésien du Ventrue quand il entendit la réponse de la rose. Non, il ne croyait pas qu'il s'agissait simplement de craintes, son ainé lui cachait des choses. Comment il le savait ? Car aucun camériste n'avouerait à un prévôt qu'un vampire était un démoniste.Les conséquences d'une pareille accusation étaient trop graves pour qu'un damné à l'esprit aussi aiguisé qu'Ismahel commette cette erreur grossière. Le primogéne disait peut-être, mais Lowell comprenait certainement.

Ses sourcils se froncèrent quand il repensa aux raisons qui avaient poussé son contact à le mettre en relation avec cet homme. Était-ce un complot ou un manque de prudence de sa part ? Le complot paraissait plus probable. Le simple fait qu'on aperçoive un tel individu sortir de son club pourrait suffire à détruire la réputation qu'il avait bâtie avec tant d'effort.

"Et depuis quand vous le savez ?"

Il était dommage que cette révélation arrive que maintenant, mais même s'il en avait été informé plus tôt, le prévôt aurait surement eu du mal à interpeller un vampire plusieurs fois centenaire sans briser plusieurs fois la mascarade. Un comble pour un prévôt. En fait cette question posée sur un ton neutre, n'avait pas vraiment d'importance. Il n'en attendait même pas de réponse honnête, le plus important pour lui était le fait qu'il disposait à présent d'un visage et peut-être de un ou deux noms. Deux noms, car en bon investigateur, le Ventrue n'excluait pas la possibilité que Phosphoros ne fut qu'un avatar du mystérieux Philippe, ce qui pourrait en plus justifier pourquoi Philippe était le premier à faire mention de ce dangereux sabbatique.

"Peu importe cela ne réglera pas nos problèmes."

Le prévôt soupira longuement, un peu d'exaspération, un peu de lassitude. Il posa sa tête chauve sur le dossier de son siège en admirant le lustre de cristal qui illuminait la pièce.

"Et ils sont nombreux, la destitution d'un prince, l'arrivée d'un régent et maintenant l'apparition d'une nouvelle menace. Comme c'est intéressant !"

En ce moment un large sourire carnassier dévoila les canines de l'Afro-américain. Il avait l'impression qu'il avait reçu le baiser que pour être un acteur privilégié de cette période d'entropie.

"Je dois hélas vous quitter, ces nouvelles doivent être traitées sans délais, chaque seconde compte dorénavant."

La conversation semblait toucher à sa fin, à moins qu'Ismahel décide de divulguer d'autres informations sur son ancien ami. Quant au prévôt, il devait activer son réseau de sentinelle et surtout passer un certain coup de fil en Europe. Pister et débusquer ce Phosphoros n'allait pas être une tâche aisée, mais c'est justement ce qui donnait de l'intérêt à la chose.

- Asseyez vous je vous prie. Vous ne me comprenez pas... Vous... n'écoutez pas... je n'ai su ce que je viens de vous confier qu'à l'instant, jusqu'alors je n'avais pas revu Philippe. Ne vous emportez donc pas comme un de ces Brujah. C'est cette fierté qui vous habite vous autres Ventrues qui vous fait agir avec une impulsivité qui ne vous sied guère... Asseyez vous et parlons de comment appréhender ce Phosphoros...

Il avait dit cela avec une voix posée mais d'une fermeté qu'il n'avait pas encore dévoilé. Les Ventrues étaient fiers d'être les "Rois", ils étaient surtout les rois de l'arrogance comme les Brujah étaient les mentors des impulsifs. Jamais un lieu tenu par les Ventrues ne pouvaient survivre à leur arrogance s'ils n'étaient conseillés par des êtres éminemment plus calmes et circonspects comme pouvaient l'être les Toréadors et les Malkaviens lorsque la politique les attiraient. La Rome des Ventrue avait défaite la Carthage des Brujah uniquement par la trahison des Toréadors qui leur ouvrirent les portes... Et cette Rome s'effondra à peine les Roses l'eussent-elles délaissées pour Constantinople, cité qui survécu à sa "mère" de plus de cinq siècles...
L'Histoire parlait parfois mieux que les mots pour expliquer qui du roi ou du conseillé était le plus avisé... Le prévôt s'emportait comme un nouveau-né,bien sur il l'était mais jusqu'alors Ismahel avait pour lui autant de considération qu'à un de ses égals, désormais tout avait été balayé par cette sotte crise de nerfs.

Le Primogène de la Rose but une gorgée de son verre. Ce que Lowell Shade allait choisir de faire pourrait faire de lui un Cavalier ou un simple pion dans la lutte pour le pouvoir qu'Ismahel comptait bien mener. Au grand damne du jeune Ventrue, il n'était pas le seul Sceptre en ville, et la Rose saurait facilement approcher d'autres membres bien plus influents que lui...

Le prévôt resta quelques instants interrogatifs en regardant le toreador. Il se demandait à quel moment, il s'était emporté pour reprendre les termes de son ancien. Il reconnaissait bien avoir été en proie d'une colère, mais celle-ci fut aussi vive et éphémère qu'un feu de broussailles, rien à voir avec les coups de sang légendaires des Brujah et surtout à part un soupir, et un froncement de sourcil, il lui semblait ne pas avoir laissé cet état s'exprimer de façon physique. À moins que son ainé usait de l'auspex sur lui, ce qui était impensable. On n'utilise pas une discipline, même inoffensive sur un caïnite qui vous invitait chez lui. Ce n'était pas une règle gravée dans le marbre, comme celle interdisant toute utilisation de pouvoir au sein de l'Elyseum, chacun pouvait faire ce qu'il voulait, en espérant que l'hôte ne soit pas susceptible.

Quoi qu'il en soit, le prévôt ne comprenait pas en effet. Il ne comprenait pas ce que venait faire la fierté ici, car Lowell avait bien précisé qu'il comptait se mettre rapidement à la poursuite du dénommé Phosphoros. De même qu'il ne comprenait toujours pas comment Ismahel pouvait formuler l'hypothèse que Philippe soit du côté des démonistes grâce à la seule lecture de quelques lignes manuscrites sur une feuille. Lowell était un nouveau-né certes, il n'avait pas de longs titres qui précédaient son nom, mais il n'avait jamais vu un vampire accuser un autre sans une preuve tangible et surtout pas devant un prévôt. Cela restera surement un des nombreux mystères de Los Angeles, car apparemment, il n'obtiendra jamais de réponse sur ce phénomène.

"Vous vous méprenez aussi, mon ami, ce qui me force à quitter cette pièce n'est que l'urgence de la situation et pas autre chose. La seule piste que nous avons est ce fameux Philippe et vous savez mieux que moi comment il est facile de disparaître dans une cité aussi grande que la nôtre. Chaque seconde compte. Phosphoros n'est qu'un nom que j'entends pour la première fois, qu'une rumeur, qu'une légende, comment appréhender une légende ? Il faut lui donner chair ! Philippe est visage et il est le premier à faire mention de ce nom et il est de chair."

Un visage et d'après le récit du primogène, il n'était pas un Lasombra, son image avait été captée par un des "snake eye" qui filmaient les pièces du cabaret ou tout simplement par le système de vidéosurveillance de la ville, voire même par un appareil photo des spectateurs. D'ici quelque temps la photo du suspect aura fait le tour de son réseau de sentinelles. Mais les choses pourraient être simple si Ismahel en vieil ami de ce Ravnos déviant pouvait l'informer. Sur ce point-là, il fallait que les choses soient claires et limpides, il voulait des informations pas des conseils.

"Alors aidez-moi plutôt à retrouver ce Philippe. Donnez-moi des informations sur ses activités favorites, ses lieux préférés, même ses gouts en matière de femme. Tout et n'importe quoi."

Les vampires avaient tendance à conserver leurs vieilles habitudes ou de les adapter à l'époque en cours. Il était logique qu'il commence par enquêter sur les habitudes de vie. Une autre méthode consistait à attendre que ce dernier entre en action. D'après la lettre, Lowell et Ismahel étaient menacés, tôt ou tard il devra s'en prendre à eux, mais le Ventrue préférait avoir l'initiative. Contrairement à la proposition du toreador, il resta debout en attendant la réponse.

Il n'était plus question d'influence ou de situation personnelle, ce ne l'était plus depuis qu'il avait lu ce message.

Le prévôt sembla outré par la déclaration du Toréador. Sans doute croyait-il qu'il avait usé de son Augure pour connaitre la sotte d'humeur du sceptre. Mais Ismahel n'avait nul besoin de cela, il connaissait mieux que personne le langage du corps, en particulier les yeux. Le regard en dit plus que les mots... Le Ventrue avait eu les pupilles qui s'étaient rétrécies signe de colère, de tristesse ou de contrariété. Il avait bougé les yeux en direction de la lettre de manière répétée puis avait fixé sans scier le Primogène, preuve qu'il était sur la défensive, et que son inquiétude vis à vis de la lettre, était exacerbé par le calme du Toréador. Ses quelques éléments regroupés avait suffi pour qu'il perce le ressenti du Ventrue : il se sentait dépossédé face à la nouvelle, faible face à l'ingorance et en était furieux ; furieux de ne pas savoir, furieux qu'un caïnite puisse en savoir plus alors qu'il était prévôt, furieux d'avoir échoué.
Le Primogène allait devoir lui donner un os à ronger pour qu'il calma ses ardeurs.

"Vous vous méprenez aussi, mon ami, ce qui me force à quitter cette pièce n'est que l'urgence de la situation et pas autre chose. La seule piste que nous avons est ce fameux Philippe et vous savez mieux que moi comment il est facile de disparaître dans une cité aussi grande que la nôtre. Chaque seconde compte. Phosphoros n'est qu'un nom que j'entends pour la première fois, qu'une rumeur, qu'une légende, comment appréhender une légende ? Il faut lui donner chair ! Philippe est visage et il est le premier à faire mention de ce nom et il est de chair. Alors aidez-moi plutôt à retrouver ce Philippe. Donnez-moi des informations sur ses activités favorites, ses lieux préférés, même ses gouts en matière de femme. Tout et n'importe quoi."

Bien, il allait tout lui dire mais Ismahel doutait que cela puisse grandement l'avancer. Il avait connu Philippe en un temps reculé, tant de choses avaient pu se passer. Mais si le prévôt le désirait...

"- Je n'ai que peu connu Philippe. Il était un de ces anarchs qui cherchait à rester au plus loin des troubles nouveaux qui affligeaient la Sainte Camarilla. Il s'était reclus comme dans son château en tant que Comte de Valentinois. Il n'a jamais posé de problèmes à la Camarilla. Il nous aidait même à traquer certains dégénérés. Il avait à l'époque l'exécration de la diablerie et de la monstruosités des sabbatiques. Il prônait des idées selon lesquelles les vampires devaient aidés les hommes à dépasser les carcans imposés par les plus riches et par le clergé. C'était un de ces philosophes et artistes qui passait des journées à disserter sur le droit, la vérité, la religion, la conscience, la politique et l'être.
Il se nourrissait exclusivement sur les criminels sans pour autant les tuer. Au bout de plusieurs décennies, il est parti pour Paris où il s'est présenté à François Villon jusqu'à ce que le Premier Toréador de France voulut l'impliquer dans le Jyhad. Il fuit et c'est alors que j'ai perdu sa trace... "

" Memento Mori."
" Respice post te! Hominem te esse memento "
Vanitas...
Ces mots trottaient dans l'esprit d'Ismahel. Alors qu'il était encore enfant, il avait lu et entendu ces locutions. Il avait été éduqué dans cette esprit. "Souviens toi que tu es mortel" lui disait Severus. Désormais, c'était le Primogène qui devait se persuader de cela. Non plus pour lui car il connaissait sa faiblesse. Mais pour ce Phosphoros. Ce terrible Phosphoros. S'il était Priscus, c'est qu'il était puissant. Et si c'était Philippe alors il était Ravnos... Les Gitans... Eux et leur Chimérie étaient redoutable. Un Gitan renégat vieux de plusieurs siècles était bien la pire chose qui pouvait arriver.

Il reçut un sms, il le lut puis il finit son verre. Et se leva.

"- Je suis désolé. Je vous demande de vous asseoir pour que nous puissions discuter de la marche à suivre mais mon Clan me réclame. Nous nous reverrons à l'Elyseum mon ami. Si j'arrive à obtenir un entretien avec le Régent, je ferai par de votre diligence à prendre en compte et tout mettre en oeuvre pour capturer et détruire ce sinistre Phosphoros.
Bien à vous."

Bon investissement ou pure perte. Lowell ne savait pas comment qualifier les dernières minutes accordées au Primogéne des Toreador. Il s'attendait à quelque chose de plus précis, mais au moins il avait pu retracer une partie de l'historique du fameux Philippe. C'était déjà mieux que rien. La poursuite des Sabbatiques était comme la recherche de l'or, on devait se contenter de paillettes et de petite pépite en attendant de tomber sur le filon, mais la patience et la minutie qu'on mettait dans ses investigations payaient toujours, à condition de ne pas se faire avoir par les proies qu'on pistait.

"Je vous remercie et de mon côté je n'oublierai pas de signaler à quel point vous m'avez aidé quand je serais face à notre régent avec je . Dommage que votre clan vous réclame. J'espère que ce n'est pas trop grave."

En tout cas il ne pouvait s'empêcher de se demander quel était donc ce problème urgent qui précipitait le départ. Une attaque de ce Phosphoros, déjà ? Comment ne pas envisager ce scénario depuis la lecture de cet avertissement. Toutefois les Toreador pouvaient se vanter d'avoir un représentant aussi disponible et réactif qu'Ismahel. Ce vampire maniait les arcanes de la politique avec talent et si Lowell n'était pas un autocrate obstiné, il l'aurait surement pris pour modèle.

"Bien à vous aussi très cher et soyez prudent, nous ne pouvons pas prendre ces menaces à la légère."

Le danger rodait dans les rues de Los Angeles. Il n'y avait aucune oasis de sécurité pour les camaristes quel que soit leur rang, leur fonction et leur âge. Bien qu'il ait des pouvoirs limités, l'ambitieux Lowell se devait de tout faire pour éradiquer ce danger. Une rencontre avec le régent s'imposait, mais avant il devait localiser le dénommé Philippe. Il était temps de se mettre au travail et surtout de sortir de leurs lits tous ces policiers et magistrats qu'il payait grassement et surtout d'appeler la France, puis l'Angleterre.Comme il l'avait dit plus tôt chaque minute était précieuse.

» Une éternité avec toi [Ismahel Lucilius]
» Journal d'Ismahel Lucilius Gaebius - Le Rêve se transmet
» A vouloir se prendre pour James Bond... [Pv Roberto Giovanni et Ismahel Lucilius]
» Bienvenue dans ta non-vie [PV : Lisbeth]
» Lettres au Régent, à Lucilius

Aux premieres loges [PV Ismahel Lucilius]

Aux premieres loges [PV Ismahel Lucilius]

Sujets similaires

Sujets similaires