Et la Rose succomba à la Dame [PV suite avec Raven]

- Voilà une demeure atypique...comme vous, dit-elle en souriant, atypique le maître mot chez les artistes...Cette décoration vous défini parfaitement...
Personnellement, j'aime marier le rustique au moderne...cela donne un petit quelque chose de réconfortant... Les vieux meubles racontent une histoire, offrent une certaine sécurité... Alors que le moderne nous permet de ne pas nous complaire dans le passé et de nous crier qu'il faut penser au présent pour forger une avenir digne de ce nom...

Il est vrai que le Domaine du Primogène avait un luxe assez atypique. Le devant était aménagé comme un jardin à la française agréablement fleuri, on arrivait par une imposante grille de laiton noir. Puis un chemin de petits rochers blancs encadré de ruisseaux d'eaux claires où nageaient des carpes japonaises, emmenait aux portes d'ébènes et de ferronneries en aluminium poli de la demeure. On pénétrait alors dans un hall de marbre au fond duquel se présentait une porte vitrée. De chaque coté de la porte se détachait un imposant escalier de marbre noir qui permettait d'accéder à l'étage et aux ailes supérieures de la demeure. Depuis le hall, on pouvait aussi accéder par deux larges couloirs, aux ailes inférieures Nord et Sud de la bâtisse. Le hall était décoré de tapis, de tableaux, de sculptures taillées par Ismahel et d'une fontaine du même artiste. Présenter ainsi ses créations ne venaient pas d'un orgueil démesuré mais d'un encombrement tel des combles et des caves qu'il avait du se résigner à entreposer de nombreuses œuvres dans les pièces à vivre.
Alors qu'il laissait à Raven le loisir d'observer le hall, Ismahel s'approcha d'une des deux bibliothèques présentes et y saisit un imposant ouvrage qu'il glissa dans son brocart.

Puis il amena Raven, lui proposant son bras, vers la porte vitrée. Elle s'ouvrit automatiquement à leur présence et les fit arrivé dans son « jardin d'hivers », une vaste serre où l'on trouvait des fleurs tropicales et une faune variée. Pour accéder à cette serre, deux escaliers s'ouvraient sur la gauche et la droite mais Ismahel parut préférer l'escalator en face d'eux. Ils traversèrent lentement la serre pour se diriger à la porte en face qui donnait sur la galerie. Un petit musée de 70m² sur deux étages. Ils se dirigèrent à travers les nombreuses œuvres d'Ismahel afin d'atteindre l'escalier menant au niveau inférieur où étaient entreposés les œuvres picturales de tiers.
Là il la mena dans un pièce uniquement réservée aux Nymphéas. Les vastes panneaux étaient délicatement disposés dans un espace où la lumière leur donnait toute leur beauté. Un banc de marbre blanc était installé au centre de la pièce.

- « Asseyons pour contempler la beauté d'un tel présent que Monet à fait à l'Humanité et au Monde.

L'alchimie parfaite des couleurs était si belle, si pénétrante qu'à chaque fois l'âme du Toréador fondait en larmes. Cependant, il était inconvenant de verser des larmes vermeilles en présence d'une humaine, aussi proche eut-il pu être d'elle. La mascarade avait un prix.
Au bout de quelques minutes de contemplation, il saisit le livre. Et le lui tendit.

- En vous écoutant parler avec une telle passion de la psychologie et des enfants, je me suis dit que ce livre vous conviendrait mieux qu'à moi, prenez, c'est un cadeau.

Rêves d'enfants, de Jung avait été une découverte pour Ismahel mais à trop le lire, il en connaissait désormais chaque phrase. La belle Raven en ferait meilleur usage que lui s'était certain.

- Une fois que vous aurez eu satisfaction de ce tableau, vous n'aurez qu'à jeter un coups d’œil dans ma bibliothèque pour voir si d'autres ouvrages vous intéressent. »

Il y a des choses dont ne peut pas se lasser Raven et la contemplation en était une. Assise sur ce banc d'un blanc parfait, la jeune femme se laissait imprégner par la peinture avec un plaisir non dissimulé. La voilà désormais invité dans un monde où les couleurs se mariaient ensemble dans une harmonie rare et hypnotique. Plus rien n'avait plus d'importance pour la jeune femme, rien à part la peinture et elle.

C'est ce qui arrive le plus souvent lorsque la demoiselle se retrouve en présence d'une chose qu'elle adore. Mais cet amour de l'art est apparu avec l'un de ces parents adoptifs, gardien de musée. Ce dernier recevait des tickets d'entrée pour le musée et tous les weekends, Raven s'y rendait observant la moindre sculpture, la moindre peinture... Tout était si divin à ses yeux, elle faisait partie d'un autre monde qui mélangeait plusieurs époques en une seule. C'était un effet magique et stupéfiant.

Sa passion fut telle qu'elle connaissait chaque oeuvre du musée et chaque coin et recoin qu'elle fut engagée pour guider les gens lorsqu'ils cherchaient une peinture particulière. De quoi se faire un peu d'argent de poche et de ne jamais prétendre de la famille qui l'avait accueilli alors. Le patriarche avait ressenti de la fierté devant le déploiement d'effort de l'adolescente qu'était Raven et son style l'avait porté à confusion, mais l'avait finalement plus trompé qu'autre chose.

Sourire aux lèvres, Raven manqua de laisser perler quelque larme sur ses joues. Souvenir mélangé à la joie de la contemplation. C'était stupide certes, mais même si on ne le voyait pas forcément au premier abords. La chanteuse était munie d'une sensibilité accrue et ce qui la touchait faisait forcément cet effet.

- En vous écoutant parler avec une telle passion de la psychologie et des enfants, je me suis dit que ce livre vous conviendrait mieux qu'à moi, prenez, c'est un cadeau.

Lorsque Raven regarda son hôte de la soirée, son regard dévia sur les mains pâles de ce dernier pour finir par ouvrir de grands yeux sur le livre qu'il lui tendait. Incroyable, c'est un livre qu'elle avait lu et relu et elle pouvait parfaitement dire ce qu'il contenait et en faire un résumé, mais cela serait dommage de supprimer le goût de cette lecture profonde.

Prenant délicatement le livre entre ses mains, la demoiselle le serra contre elle pareille à une enfant qui prenait sa peluche dans ces bras. Ses lèvres coloré de rouge s'élargirent pour former un délicat sourire.

- Merci infiniment Ismahel....

Raven n'avait plus vraiment les mots. C'était rare pour elle que de recevoir des présents surtout venant de personne qui ne la connaissait que depuis une heure et demie environ. Cela déclencha beaucoup de chose dans l'être de la chanteuse qu'elle dû fermer un instant les yeux pour barrer le passage des larmes qui commençaient à poindre doucement. Personne. Absolument personne ne s'était montré aussi bon avec elle, si, il y avait bien eu quelque exception dans sa vie, mais c'était au bout d'un certain laps de temps. Lorsque l'on comprenait finalement que Raven n'avait rien de rebelle, de macabre en elle que c'était simplement un style qu'elle appréciait sans en avoir la mentalité sombre.

Mais de prime abord, dans l'instant même, personne ne lui avait offert sourire, présent et moment de contemplation d'oeuvre qui touchait la demoiselle au plus profond de son âme. Ouvrant à nouveau les paupières, les pupilles de Raven avait prit une teinte plus claire encore, tel ceux d'un chat. Délicieuse féline délicate, mais qui pouvait montrer les griffes quand le moment l'exigeait.

- Une fois que vous aurez eu satisfaction de ce tableau, vous n'aurez qu'à jeter un coup d'oeil dans ma bibliothèque pour voir si d'autres ouvrages vous intéressent. »

- Une bibliothèque ? Vous avez le paradis chez vous ? Quelle chance de vivre au milieu de ces œuvres et des livres...

- Merci infiniment Ismahel...

La sincérité de Raven était bouleversante. Le vampire le savait, le sentait... la gratitude toucha ce qui devait rester du cœur du vampire. Donner sans attendre de rétribution était devenu pour le caïnite si rare et pourtant avec cette femme il l'avait fait sans arrières pensées, aucune... il ne désirait pas même qu'elle devienne en contrepartie une œuvre de sa collection. Non le vampire avait été touché par la belle femme, il s'était rappelé du temps où le soleil était son compagnon, il s'était rappelé lorsqu'il était avec son Sire, lorsqu'il était avec Amelia... elle lui avait fait revivre ses plus agréables moments, le peu de joie qu'il avait vécu en tant d'années d'éternités.

Il se sentait d'ailleurs désemparé, affaibli en un sens, une goûte de sang commença à poindre au coin de son œil. Il la remarqua suffisamment tôt pour l'essuyer avec son doigt et empêcher son âme de s’épancher sous les yeux de l'humaine. En présence d'une œuvre si magnifique, d'une femme si particulière et en une période comme celle qu'il vivait depuis que son amie de toujours avait été dépossédée, le Toréador était bien trop sensible pour ne pas être ému au plus profond de son âme. Raven semblait elle aussi bouleversée. Lorsqu'elle ouvrit de nouveau les yeux, ces derniers avaient acquis l'apparence de ceux d'un chat. Splendide femme que cette Raven, authentique et sincère, belle d'âme comme de corps.
Que le Père soit béni s'il me l'accordait... se surprit à penser Ismahel. Elle est intelligente, a le sens artistique et la capacité de s'imposer ; elle a de la présence et des bonnes manières. Elle a les qualités que l'on peut espérer voir chez une Rose. Une belle rose rubis et onyx...
Ismahel n'avait jamais étreint. Il était notoire que dans son Clan les membres étreignaient à tout va, soi parce qu'ils voulaient cristalliser la beauté d'un beau corps soi pour ne pas voir mourir un artiste qui le plus souvent perdra son talent en même temps que l'éphémère préciosité de la vie...
Non Ismahel n'était pas de ceux-là, lorsqu'il trouvait un humain trop beau ou trop talentueux pour souffrir les ravages du temps, il le transformait en goule et non en Rose mais là c'était différent. Il sentait en Raven quelque chose qu'il n'avait jamais ressenti chez un humain auparavant.

- Une bibliothèque ? Vous avez le paradis chez vous ? Quelle chance de vivre au milieu de ces œuvres et des livres...

Il se leva doucement. Proposa sa main à Raven.
- Sans mes livres et mes œuvres, je ne suis qu'une coquille vide, un corps privé de cœur, une bouche sans lèvres, une existence sans muse... suivez moi Mademoiselle Cooper, vous devriez apprécier ce que nous trouverons là-haut.

Il l'emmena alors vers le fond du couloir où se trouvais un ascenseur qui les mena directement au premier étage où se trouvait la bibliothèque. Ils croisèrent Tysha qui se prélassait sur canapé dans l'immense pièce. Dès qu'elle les vit elle se leva en silence, les salua de la tête et déguerpit.

- C'était mademoiselle Darthos, ma jeune cousine. Vous avez du peut-être l'apercevoir lors de mes réceptions et expositions. Une jeune femme pertinente quoique touchée d'une flemmardise incurable. Bien... voilà ma bibliothèque.

La bibliothèque était sans nulle doute la pièce la plus vaste de la demeure. Elle occupait la plus grande partie du premier étage. La pièce était haute, vaste (immense selon certains) et surtout tapissée d'étagères contenants des centaines peut-être même des milliers d'ouvrages. Le centre de la pièce était occupé par un cercle de canapés, de banquettes et de fauteuils disposés en un large cercle. Ismahel y donnait là des cercles de discussions mondains et savants. Il l'invita à fouiller dans les étagères tout son saoul. Pendant ce temps il alla s'installer au clavecin qui était dans le coin gauche de la pièce et commença à improviser un air doux, aiguë et chantant.

Tandis que le caïnite et l'humaine se rendait à la bibliothèque, Raven ne pu s'empêcher que de tomber de plus en plus sous le charme d'Ismahel. Distinguée, courtois, gentleman, c'était comme s'il venait d'une époque où toutes ces notions existaient encore et qui malgré les années passant, il ne s'en était aucunement détaché. C'était une certaine fierté et un honneur que d'être à son bras, dans sa demeure et à recevoir un présent dont d'autres femmes se ficheraient royalement. Pourtant, ce simple cadeau signifiait beaucoup pour Raven qui en recevait peu. Son groupe était plutôt du genre à se cotiser pour lui acheter une petite babiole le jour de son anniversaire genre des mitaines, un haut, un album ou bien un livre. N'ayant qu'un petit job, ils ne peuvent pas faire plus et ils s'étaient arrangés pour faire de la collocation pour se partager l'appartement contrairement à Raven dont l'indépendance est une seconde peau ne pouvait se résoudre à vivre avec quelqu'un. Etant parfois assez maniaque sur les bords, elle savait qu'on ne la supporterait pas longtemps.

Une femme passa à côté d'eux, gêné d'être prise en flagrant délit. Cela amusa la chanteuse qui lui sourit à son passage tandis que cette dernière s'effaçait lentement. Raven émit un doute, mais il disparut lorsque Ismahel lui dit que c'était sa cousine. Elle le croyait, elle en avait envie, du moins elle espérait avoir raison de croire en lui. Puis peu à peu son intention se porta sur l'immense bibliothèque de la salle, jamais Raven n'a vu autant de livres dans une demeure hormis une bibliothèque municipale où elle a passé la plupart de son temps à travailler pour avoir ses diplômes.

Lorsque Raven se tourna, c'était lorsqu'elle entendit le son du clavecin. Il était également un musicien, la chanteuse esquissa un sourire tandis qu'elle regardait les titres des livres. Il y avait absolument de tout, toutes catégories confondu de la cuisine à la menuiserie passant même par... L'ésotérisme ? La wicca ? Voilà un sujet intéressant pour Raven, elle qui adorait le monde de la magie et du paranormal. La jeune femme se souvient qu'au lycée et même encore maintenant, la visite de la maison hantée dans un parc d'attraction se trouve être une partie de plaisir. En sortant, on pouvait la voir main dans les poches progressant d'une démarche calme alors que deux de ces amis se tenaient contre elle ou parfois des filles ayant un style aussi atypique qu'elle.

Souriant, Raven finit par aller prendre place aux côtés d'Ismahel et décida de jouer avec lui improvisant également et faisant attention de marier ces notes à celui de l'homme qui se trouvait être un vampire. Chose qu'elle ignorait parfaitement. Un jeu à quatre mains, jamais Raven n'avait pu en faire ayant apprise toute seule à apprivoiser les gammes. Violon et piano l'ont toujours attiré et elle a travaillé dur comme fer pour pouvoir se permettre d'acheter ces instruments. Ne touchant jamais à ses économies profondément endormi à la banque.

- Autant artiste que musicien ajouté à cela courtois, distingué, gentleman, charmeur, polie...Seriez-vous l'homme idéal en faite ?

Un léger sourire étira les lèvres légèrement rouges de la jeune femme. Elle n'avait pas pu s'empêcher de dire cela.

- Désolé, si je vous parais trop directe. J'ai tendance à dire ce que je pense sans passer par quatre chemins. Mais à quoi bon cacher certaine chose n'est-ce pas ?

Continuant à jouer, Raven laissa son esprit s'ouvrir pour se câler au monde d'Ismahel.

- J'ai vu que vous vous intéressiez à l'ésotérisme. Est-ce que le monde de l'occulte titille votre curiosité ? Peut-être pourrions-nous un jour converser sur ce sujet... Partager nos connaissances.... J'en serais vraiment contente. Ou peut-être mythologie, créatures surnaturelles, musique... J'aimerais continuer à parler avec un homme aussi distingué qui ne baille pas au bout de quelques mots échangés... Mon groupe est plus porté bière et fille. Ils sont amusants et toujours là quand il le faut, mais j'ai besoin d'une personne qui soit comme moi. C'est bête ce que je vais dire, mais j'ai l'impression de vous connaître depuis longtemps. Je n'ai pas l'impression de parler à une personne à peine rencontrer, mais à une personne qui me connaît depuis longtemps et qui me soit précieuse. Je n'ai jamais ressenti cela aupa....

Raven se lève se rendant compte que peut-être son honnêteté allait trop loin des convenances dont était habitué Ismahel. Peut-être descendait-il de noble lignée et que ce genre de chose ne se fait pas chez lui.

- Pardon...excusez-moi, je me suis laissée emporter.

Commençant à jouer du clavecin, Ismahel remarqua du coin de l’œil l’intérêt que semblait porter la jeune femme à la section dédiée à l'occultisme dans sa bibliothèque. Cette section était principalement constituée des livres récupérés par son Sire, Severus. Severus était en effet, un Nodiste averti, un passionné de la quête de Golconde, quête qu'il n'avait pas pu suivre bien longtemps du fait de son attachement profond à la cause camariste qui l'avait occupé la majorité de sa vie. La section était constituée en majorité d'imposants volumes et grimoires, on y trouvait aussi quelques rouleaux de parchemins antiques et même dans une petite boite d'ébène, une tablette sumérienne retraçant une partie de l'histoire de la Première Cité. Ce trésor était heureusement caché par l'insignifiance de la boite car celle-ci était disposée en retrait alors que devant tous les autres volumes, trônait sur un lutrin ciselé un épais ouvrage.
La couverture incrustée d'ivoire taillée était renforcée d'argent et de fer noir. Un cadenas d'airain fermait l'ouvrage et une clé en or était posée à coté du livre. Sur la face du volumineux document, on pouvait lire « Essai sur l'essence de la vitae, traduit par Gondebeau de Filartreuil, Ancilla des Rois et Comte du Sussex, à partir d'un texte original de Hassan El- Bahir, Ancien des Lames ».

Bien qu'il tenta de rien faire paraître, le Primogène fut pris d'un certain effroi en se rappelant le titre et sous-titre de l'ouvrage. Mais il se calma bien vite, réalisant que la Mascarade n'avait rien à craindre, que pouvait-elle comprendre de toute façon à un tel charabia. Il s'arma tout de même de mots au cas ou elle l'interrogerait à ce sujet.
Mais au lieu de l'interroger à propos des étrangetés de sa bibliothèque (le volume de De Filarteuil n'étant pas le plus bizarre, et encore moins le plus obscurs... ), Raven vint partager le plaisir musical auquel il s'adonnait. La jeune femme mariait avec un talent notable ses notes à celles d'Ismahel.
L'instant était exquis pour le Toréador, comme une étreinte passionnée. Comme le premier baiser de deux amants, leur improvisation était enflammée, profondément personnelle et par dessus tout divinement excitante. Trouver un tel talent dans cette ville était une surprise exquise.
Le Toréador, tant pris par la musique, faillit se mettre à jouer « réellement », en puisant dans sa sensibilité, dans son sang, dans sa Célérité. Ses notes s’enchaînant peu à peu avec une vitesse rare, seule un instant de lucidité et la voix de Raven purent empêcher le Bris de se produire. Il était en effet notable dans les salons Florentins du Clan de la Rose qu'Ismahel était un des plus vertueux pianistes que nombre d'entre eux avaient eu la chance de rencontrer.
En effet, la Célérité qu'il avait à l'origine maîtrisée pour défaire au plus vite ses ennemis était devenue son arme la plus terrible lorsqu'il s'emparait d'un instrument. Il transformait le moindre fleuve de notes en un tumultueux orchestre qui déversait des milliers de sonorités diverses qui se mêlaient en une osmose divine de musique.
Mais en effet, cela ne se produisit pas car les lèvres si désirables de Raven s'ouvrirent pour sauver le caïnite de son élan tragique.

- Autant artiste que musicien ajouté à cela courtois, distingué, gentleman, charmeur, polie...Seriez-vous l'homme idéal en fait ? Désolé, si je vous parais trop directe. J'ai tendance à dire ce que je pense sans passer par quatre chemins. Mais à quoi bon cacher certaine chose n'est-ce pas ?

- Ne vous excusez pas, une telle sincérité est la preuve que vous m'appréciez et je ne peux que m'en réjouir. Si je puis revenir sur ce que vous avez dit, je doute qu'il existe en cette terre un homme idéal, mais un homme idéalisé sans doute. Tout dépend ce qui vous touche chez un individu... Vous m'avez parlé du regard critique des autres, si certains vous trouvent étrange, je vous trouve madame on ne peut plus exquise et votre conversation, un régal.

Raven se semblait se sentir particulièrement à l'aise en sa compagnie et cela était étonnamment réciproque. Il avait l'impression de jouer et parler avec une amie d'enfance ou une épouse de longue date ou même son enfant... Que pouvait bien être cette sensation qui parcourait peu à peu l'esprit et le cœur d'Ismahel ? Quel était ce feu qui remontait à travers ses veines mortes ?
Alors que la caïnite se concentrait sur cette étrange sensation, Raven s'épancha, lui confiant son désir de discuter avec lui de sujets moins banals que ceux auxquels elle était habituée avec ses amis.
Mythologie, musique et bien sur occulte et... créatures surnaturelles ? Que peut-elle bien connaître des créatures du monde caché ? Ces connaissances sont-elles théoriques, sorties tout droit de livres ou de films ou étaient-elles empiriques, issues d'une expérience plus troublée et sombre que je ne l'imaginais ?.. Et puis de quelles créatures parle-t-elle ? Des Changelins ? Des Lupins ? Des créatures de l'au-delà ? Ou bien pense-t-elle à la noble race des Enfants de Caïn ?
Alors qu'il s'interrogeait, Raven se leva, troublée, craignant d'avoir dépasser les limites d'une convenances dont Ismahel, piqué au vif par la curiosité qu'elle avait créé en lui tant par sa personnalité que par sa discussion, n'avait cure en cet instant.
Il lui sourit puis termina en quelques secondes le morceau et se leva en se dirigeant vers le petit meuble à coté du clavecin où trônait un lecteur de vinyles. Il enclencha le bouton du l'appareil d'où se mit à raisonner « L'Orfeo » de Monterverdi.

- Ne vous troublez pas ainsi. Je vous assure que votre sincérité est d'une pureté si rare qu'en être le sujet est un honneur auquel je ne peux vous répondre qu'en vous invitant à danser.

Il lui tendit alors sa main tout en se rapprochant d'elle. Il passa son autre main autour de sa taille et dit :

- Je ne sais pas si vous êtes habituée à ce genre de danse. Laissez moi vous guider.
Et sachez que ce serez un véritable plaisir pour moi de discuter ésotérisme et mythologie avec vous. J'ai toujours pensé que le monde était empli de choses que l'on ne pouvait comprendre tant que l'on restait figer dans un pragmatisme glacial. Plus il parlait, plus son visage s'approchait de celui de la jeune femme.
Cependant, j'aimerai savoir ce que vous entendez par créatures surnaturelles ? Vous pensez que les trolls, les loups-garous et les gobelins parcourent les landes ? Si tel est le cas, je resterai en ville...

Il émit alors un rire cristallin alors qu'il commençait à entraîner Raven au centre de la bibliothèque devenue une salle de bal improvisée.
Connaîtrait-elle l'existence des caïnites ? A-t-elle mis à bas le voile de la Mascarade?

Raven se laissa guider par les caïnites. Si elle savait où elle se trouvait peut-être réagirait-elle autrement ? Peut-être serait-elle craintive ou au contraire, elle continuerait à agir comme elle l'avait toujours fait jusqu'à présent. Mais le mystère qui entourait sa vie était loin de la laisser souffler. Néanmoins, son esprit ne pouvait qu'être accaparé par le regard d'Ismahel dont le visage était proche du sien. Sa petite blague eut effet de la faire rire également puis taquine, elle lui dit.

- Prenez garde, je suis peut-être une fée...une sorcière ou bien une vampire et je pourrais profiter de votre naïveté et me repaître de votre sang.

Ceci n'était qu'un peu de taquinerie rien de bien méchant, mais l'homme qui se trouvait face à elle appartenait à ce monde qui pour elle l'attirait, mais faisait naître des tas de questions. Son esprit scientifique la poussait à vouloir savoir ce qu'il y avait au-delà des choses voulant se repaître de plusieurs informations qui pourrait la mener vers un chemin qui la ferait s'évader de la réalité.

Valsant avec Ismahel, Raven suivait les pas de ce dernier apprenant rapidement les bases de la danse qui pour elle est un mystère pour le moment. Bien qu'elle écoutait de la musique classique, la demoiselle n'a pas pu aller jusqu'à apprendre la valse. Qu'importe, son hôte lui montrait les bases, les pas à suivre la guidant, l'amenant dans son monde. Le monde de la Rose.

Subjugué. C'était le mot approprié à la situation. Le corbeau à la voix d'or sentait son coeur battre de plus en plus, alors qu'ils progressaient au milieu de la bibliothèque improvisée en salle de balle. Entouré de livres, cela donnait une note intéressante à ce qui se déroulait entre la mortelle et le non-vivant.

Au bout d'un petit moment, Raven se tint contre lui s'arrêtant de danser. Joues rosées, le souffle court et la tête qui tourne, la jeune femme se laissa aller contre le caïnite et fut surpris par son corps ... Froid ? Elle le regarda intrigué ne sachant pas s'il est frileux ou bien...Non, mieux vaut pour elle de ne pas dériver sur un chemin stupide. Pourtant, cet homme l'hypnotisait d'une manière bien trop étrange, jamais aucun homme n'avait su la conquérir aussi facilement et en une soirée seulement.

Les mains de la jeune femme se posa sur les joues d'Ismahel avec délicatesse.

- Auriez-vous froid Ismahel ?

Raven esquissa un sourire se perdant un peu plus dans un chemin qui risquait fort de changer sa vie plus qu'elle ne l'aurait imaginé jusqu'alors. Lentement, elle se remit à danser avec son cavalier se laissant à nouveau porter par la délicate musique s'élevant autour d'eux et leur offrant un cocon de magie, de mystère et de poésie.

- Pardonnez cette familiarité soudaine... Mais vous êtes si froid... Je n'aimerais que vous vous retrouviez mal à cause de cela...

- Prenez garde, je suis peut-être une fée...une sorcière ou bien une vampire et je pourrais profiter de votre naïveté et me repaître de votre sang.

La plaisanterie fit sourire Ismahel mais en même temps le fit réfléchir à son comportement. Est-il, comme elle plaisantait de faire, entrain de profiter de sa naïveté ? Il ne pouvait accepter qu'une telle idée germa dans son esprit. Il devait encore s'assurer de quelques petites choses avant de lui avouer. Oui, il briserait la Mascarade ce soir mais ce ne serait pas par égoïsme, non il la briserai car le bouquet de Los Angeles pouvait enfin espérer se targuer d'une Rose à la magnificence d'aucune autre...

Et ils tournèrent et dansèrent, le caïnite entendait s'emballer le cœur de l'humain, la peau d'ivoire de ses joues se teintaient de roses alors que celle du vampire restaient de marbre. Les pupilles de Raven étaient ouvertes au milieu de cet iris si clair.
La Rose et la Corneille tournaient à travers la pièce. Cela rappelait au vampire ces bals que l'on donnait alors qu'il était encore en Europe. C'était à St-Peterburg qu'il avait appris l'art noble de la valse. Depuis il avait appris à de nombreux êtres qui parcouraient cette terre. Certains comme Emilio Salvateri désormais du Ancilla du Clan de la Rose, avaient été de brillants élèves, d'autres comme le vampire Kehaku, des échecs cuisants. Si tout le monde ne pouvait apprendre avec aisance cet art, Raven était une merveille.

Après un long moment, Raven s'arrêta et se laissa aller contre lui. Puis le regarda, plongeant son regard si clair dans les améthystes si sombres de son regard. Puis elle posa ses mains contre les joues du caïnite. Il sentit l'épiderme de l'humain tressaillir imperceptiblement au contact de la froideur de sa peau immortelle.

- Auriez-vous froid Ismahel ? Pardonnez cette familiarité soudaine... Mais vous êtes si froid... Je n'aimerais que vous vous retrouviez mal à cause de cela...

Alors qu'ils reprenaient doucement leur danse. Ismahel caressa du bout des doigts le bras de Raven.

- La danse a du vous échauffer le sang. Je ne suis guère plus froid qu'à notre rencontre. Dit-il avec un sourire.

Il vit qu'en dansant, il se dirigeaient vers le rayon « Histoire » de la bibliothèque. Si ce rayon semblait innocent, il était pourtant le plus détaillé sur les vampires, sur leur Histoire, sur leur légende... Il ralentit le rythme de la danse au point de s'arrêter doucement. Il saisit un ouvrage et conduisit Raven vers un canapé cosue pour qu'elle puisse s'asseoir et reprendre doucement ses esprits. S'essayant à coté d'elle, caressa doucement la couverture du vieil ouvrage.

- Désirez-vous quelque chose ? À manger ? À boire ? De l'eau ? Ou du champagne peut-être ?

Ensemble, ils tournoyaient dans la bibliothèque sans se soucier du temps qui passait. Cela avait presqu'une note de féerie ce moment. Parfait, mais il y avait néanmoins, un petit quelque chose d'étrange que Raven n'arrivait pas expliquer. Elle, qui était une femme exigeante et difficile à charmer, la voilà succombant à cet homme qu'elle connaissait à peine. Était-ce possible de se laisser piéger de la sorte par des sentiments aussi fulgurant et encore floue pour la chanteuse ? Serait-ce là un coup de foudre ou bien une simple attirance devant l'attitude et l'intelligence d'Ismahel où était-ce encore plus profond encore ?

A présent assise sur le canapé, Raven tentait de reprendre son souffle et surtout ces esprits. La valse l'avait fatigué et la proximité du vampire l'avait envoûté littéralement. Ce regard profond et sombre ne la laissait pas de marbre, loin de là. Elle le savait, mais elle était tellement effrayée à cette idée. Elle qui a toujours été seule ne vivant que peu ou pas du tout d'aventure sentimentale pour rester libre ? Non, plutôt parce qu'elle ne savait vraiment pas comment faire. Traduire les sentiments humains lui étaient faciles, mais les ressentir c'était une autre paire de manche.

- Désirez-vous quelque chose ? À manger ? À boire ? De l'eau ? Ou du champagne peut-être ?

- Je souhaiterais avoir ce que vous m'avez fait goûter dans la voiture si cela est possible.

Nul doute que cela ferait le plus grand bien à notre petite humaine qui était loin de se douter de ce que lui réservait cette soirée. Soirée qui débutait à peine et qui déjà lui avait réservé pas mal de surprise depuis que Raven s'était rendu à l'exposition de son ami. Pouvait-elle se douter que la belle se trouvait en présence d'un prédateur sortit tout droit des plus anciennes légendes et qui aujourd'hui n'apparaissait que dans les films, les livres ou encore dans les rêves ou cauchemars des humains ?

C'est alors que Raven posa son regard sur le livre que tenait son hôte dans sa main. Un livre sur les vampires ? Était-il également intéressé par les légendes qui baignaient certaines civilisations ? Croyait-il aussi que Dracula était un vampire ?

C'est alors que la jeune femme prit le livre en souriant et en regarda la couverture et regarda la première.

- Je ne le connais pas celui-ci... Pourtant, j'ai dévoré tous les livres traitant sur les vampires et autres créatures surnaturelles... Où l'avez-vous eu ?

Raven prit alors, une main d'Ismahel et la posa sur sa joue.

- Excusez-moi, mais vous êtes tellement fraie que cela est agréable... Je me demande comment vous faites dit-elle en émettant un léger rire.

- Je souhaiterais avoir ce que vous m'avez fait goûter dans la voiture si cela est possible.

-Il en sera fait selon votre bon plaisir.

Alors qu'il allait se lever pour commander à Raven et à lui deux caïpirinhas, Raven posa ses mains sur les siennes pour lui retirer le livre. A ce contact, le vampire sentit une vague de soif, désir mais aussi de peur le traverser. Soif de sang, désir de la boire, peur de succomber. Bien qu'ayant longuement vécu, le Toréador était toujours soumis à cette soif qui chez lui avait toujours était virulente. Une soif qu'il tentait en permanence de calmer, de contrôler... Il reteint sa respiration le temps du contact, tentant de contrôler ses crocs. Dès que le contact fut rompu, le calme revint en lui.

- Je ne le connais pas celui-ci... Pourtant, j'ai dévoré tous les livres traitant sur les vampires et autres créatures surnaturelles... Où l'avez-vous eu ?

-Vous aimez les créatures de la nuit ? J'ai toujours trouvé fascinante l'imagination des Hommes lorsqu'il s'agissait de donner forme à leur peur de la nuit, du noir, des désirs et de la mort. Le Vampire en est la plus belle expression je trouve. Ce livre est un ancien livre qui date de l'époque où la thèse négationniste s'opposait vivement à un courant virulente prônant l'existence de tels " démons ".

Sans répondre explicitement à sa question, Ismahel ouvrait le sujet de l'existence potentielle d'êtres comme lui. Prenant, une inspiration, il saisit les mains de Raven afin l'attirer vers lui et surtout d'écarter son attention du livre. Le lui laisser librement dans les mains alors qu'elle ignorait encore tout serait trop risqué. Surtout que ce livre n'était en aucun cas, un exemple de thèse comme il lui avait dit, c'était en l’occurrence l'Histoire compilée du Clan de la Rose. Un vieux volume en ancien italien que lui avait offert par Steffano. Il traitait en particulier de l'influence de la Rose en Italie et dans le bassin méditerranéen entre son arrivée à Rome jusqu'à l'an 1845.

- Excusez-moi, mais vous êtes tellement fraie que cela est agréable... Je me demande comment vous faites dit-elle en émettant un léger rire.

Elle posa une main sur la joue du caïnite.

- Je suis froid à l'extérieur car je brûle à l'intérieur...

Il dit cela en plongeant ses yeux améthystes dans les siens. Il passa à son tour sa main contre la joue de l'humain, sa peau était douce et exhalait une chaleur si agréable, une chaleur de vie...
Il rapprocha son visage du sien. Si sa soif rouge était alors immense, c'était son désir d'humanité qui était le plus fort. Il se sentait en présence de l'humaine presque vivant à nouveau, ou peut-être plutôt plus que vivant, plus qu'humain. Il voulait non pas goûter à sa Vitae tel un calice, il voulait goûter à cette humanité si éphémère qu'elle dégageait, à cette si inconstante vie qu'elle représentait. Une vie brève mais si magnifique, si l'immortalité paraissait au début comme un don, son inconsistance était un fardeau.
Il l'embrassa.

Tout deux encore dans la bibliothèque, Raven se laissa porter par l'ambiance calme et... Et ? Il n'y avait pas de mot pour décrire ce que son coeur et son âme ressentaient en cet instant. Sur le moment, la chanteuse prit peur. Après tout, rien n'est éternel, tout est éphémère comme la vie d'un simple mortel. C'est peut-être cela qui a toujours poussé la jeune femme à vivre et voyager, connaître encore et un peu plus le monde. Le domaine de la psychologie lui permettait de comprendre l'être humain qui au fond l'effrayait.
Raven ne désirait aucunement être surprise ou encore être prise au dépourvu par la réaction de quelqu'un et aussi... Aussi parce qu'une part d'elle souhaitait se munir d'une barrière lourde, infranchissable et incassable. Depuis toute petite, on a toujours joué avec ces sentiments, ces désirs et ces rêves. Le rêve d'avoir une famille, mais en la ballottant d'une famille à une autre, cela a eu pour effet de briser la magie que possède tous les enfants du monde.

Cependant, Raven parvient à briser ce qu'elle a construit peu à peu, car elle a appris que cela ne fait que l'engloutir dans un abîme dangereux qui la renverra à un avenir loin d'être joyeux pour elle. La jeune femme souhaitait goûter, s'ouvrir tel une fleur au printemps, ne plus rien laisser passer. Cette peur lancinante lui a valu de gâcher des histoires sentimentales qui auraient pu être merveilleuse, mais la peur de Raven fut trop oppressante et forte pour pouvoir se laisser totalement aller à cela.

Enfin bref... Tout cela pour dire que la compagnie et la présence d'Ismahel faisait naître quelque chose en elle. Cet homme atypique possédait un charme fou sur lequel on ne pouvait se détourner. L'artiste ne pouvait s'empêcher de sourire, de le regarder et l'écouter délaissant ainsi le livre qu'elle lui avait pris entre les mains pour se laisser attirer par lui.

Regard plongé dans le sien, l'améthyste et le léger émeraude de Raven se croisèrent, s'enlacèrent même pour ne plus se quitter. Des regards qui semblent s'être cherché toute une vie et qui ne pouvaient faire autrement que s'observer pour rattraper le temps perdu.

Ce qui troublait encore plus Raven, c'était la froideur qu'il dégageait, le corps d'Ismahel ne possédait aucune chaleur, cela en était fort troublant. Mais trop plongé dans la lecture de ces sentiments, Raven ne s'attarda pas plus sur ce fait, qu'elle ne trouvait en soit pas dérangeant, mais agréable puisqu'elle avait chaud depuis la valse qu'ils avaient fait ensemble tantôt.

Froid à l'extérieur, car il brûle à l'intérieur. Cette phrase se répercuta encore et encore dans la tête de Raven, qui ne pu s'empêcher d'esquisse un petit sourire, tandis que telle une adolescente devant son premier petit ami, les joues de la belle s'empourprèrent quelque peu. Gêne ? Timidité ? Voilà bien la première fois qu'elle ressent cela, Raven a toujours été une personne extravertie et sans complexe. Cet être la rend si... Différente, cela en est déroutant, il faut bien l'avouer.

Mais ce qui s'en suivie lui coupa le souffle l'espace d'une faible seconde. Un baiser doux et chaud contrastant avec la froideur du corps d'Ismahel. Ce baiser semblait être pour Raven la perfection même. L'être qui se tenait contre elle dégageait le perfectionniste, personne n'est parfait certes, mais l'humain est toujours à la recherchent de la perfection sans y parvenir.

Sans réfléchir, Raven répondit à ce délicat baiser qui lui rappela la bise matinal d'un hiver doux au parfum envoûtant et exquis. Ce qui en général lui apportait l'inspiration d'une nouvelle chanson, d'une mélodie murmurait par le vent. Délicat et féerique. Aucune note sombre, simplement les couleurs harmonieuses d'un arc-en-ciel naissant.

Combien de temps dura le baiser ? Raven n'en avait aucune idée, le temps ne se compte pas dans ces moments. Seul le présent importe, le reste n'est que fioriture. Tout semblait se dérouler ensuite lentement, extrêmement lentement comme si le maître du temps souhaitait tout arrêter autour des deux âmes qui se trouvaient dans cette pièce.

Le souffle court, Raven regarda Ismahel qui l'avait prise au dépourvu. Mais, il faut dire que la jeune femme avait souhaité ardemment cela à force de lui parler et d'apprendre à connaître ce dandy venu d'un temps qui n'existe plus depuis trop longtemps. Mais comment régirait-elle si elle apprenait la véritable nature de cet homme qui à proprement parlé ne vit plus. Ismahel marche non plus vers la mort, mais à côté d'elle. Une vie éternelle parsemé d'avantage, mais aussi d'inconvénient. sa nature implique à vivre à ce que l'être mortel refuse de faire sortir qu'importe la situation.... Sa bête.

Après tout, l'homme est la bête et la bête est l'homme.

Elle répondit à son baiser avec cette passion si fébrile et délicieuse des humains. Ses lèvres pleines de vie contre celles du vampire. Ses cheveux de sang, sa peau de marbre, ses yeux d'émeraude, sa voix de cristal, son corps de nymphe... en d'autres circonstances le caïnite n'aurait su résister. La Vitae ingurgité au début de la soirée avait sans doute sauvé la jeune humaine mais en réalité, c'était la conversation et le talent de la femme qui avait séduit si profondément le Toréador que ce dernier ne désirait plus qu'une chose... une envie folle.

Lui dire.

Il voulait lui dire. Savoir ce que son jeune esprit pourrait partager avec lui quant à leur nature. Il avait autant si ce n'est plus, soif de son esprit que son corps. Il voulait dès ce soir... non.

Il était Camariste avant tout. Il était Maître des Harpies, chose bien entendu qu'elle ne pouvait comprendre. Mais lui savait ce que cela impliquait. Peut-être briserait-il le sacro-saint Secret mais il n'en fera pas son Infant sans l'aval du Régent.

Au moins espérait-il que le Patricien comprendrait. On le reconnaît Clairvoyant, espérons qu'il voit aussi l'amour en moi, tant pour la Cause que pour Elle.
Il se plierait au jugement du Maître en Son Domaine de Los Angeles, au moins accorderait-il à sa passion de s'étendre plus. À sa bouche de se délier, aux mots secrets de sortir, à son corps d'aimer.

Il avait aimé peu durant son éternité. Certains pointeraient le temps excessivement long qu'il avait passé en Torpeur ; mais lui savait. Si dans sa vie, il n'avait aimé qu'une demi-dizaine de fois, c'était car l'Amour ; le vrai le grand celui qui pousse le Toréador à mettre son existence en péril pour l'atteindre, pas l'inclination à laquelle il cède chaque nuit que Caïn fait. Non, le vrai amour, lui était rare. Ismahel avait rencontré des Roses qui passaient des siècles à le chercher. Certains même, des sages sans aucun doute qui, se refusant à ôter la vie de l'Aimé, restaient le temps de son existence avec lui jusqu'au bout puis se plongeaient à jamais en Torpeur ou se donnaient au soleil, ne souhaitant plus vivre.

La Rose n'est pas que le volage coureur de jupons que l'on peut voir parfois en lui. C'est une ivrogne d'amour, il boit la moindre goutte, il le cherche désespérément de cœur en cœur. Et aussi triste qu'il semblerait l'immortalité flétrit bien trop souvent cet amour. L'étreinte offre un amour plus long, plus grand mais il l'abîme, le blesse. À cet pensée, le jugement du vampire fut remis en question.

Est-ce son humanité que j'aime ? Est-ce elle en tant qu'esprit libre, pensant et beau ? Son esprit changera-t-il les siècles passant ? Et le sang ? Pourra-t-elle accepter le prix de l'immortalité ? Ce prix ne la changera-t-elle pas ? Si il la changera mais l'aimerai-je encore ?

Mais le corps de la femme si proche du sien, ses lèvres contre les siennes, il mit ces pensées en sourdine. Un instant, il voulut mordre sa lèvre. Par jeux ? Ou parce que l'appel du sang et de la passion était en train de le consumer ?
Une main d'Ismahel autour de la taille de Raven la gardait contre lui tandis que l'autre se perdait dans cette forêt vermeille qu'était ses cheveux.
Il plongeait son regard dans celui de la belle qui semblait fort dépourvu face à tant d’audace. Si cela n'avait été avec elle, il se serait excusé de ce comportement déplacé mais c'était elle, et il ne regrettait rien dans ce qui avait été. Bien au contraire, il ne pensait qu'à recommencer.
Goûter cette vie... mais cela était risqué. Il sentait cette envie si puissante de goûter son corps, goûter la moindre parcelle de la femme, absorber sa vitae. Se gorger de liquide vermeil...

Non ! Pas ça !

Se retournant presque, il prit soudain un air gêné, détournant le regard telle une minorée devant son premier garçon. Mais le Toréador n'avait nul honte du baiser, il en était presque fier. Non, ce qu'il tentait bien que mal à cacher c'était ce visage, ce visage assoiffé, ce visage qu'il abhorre, ce visage bestial...
L'améthyste était devenu le rubis. Cela ne pouvait persister.

Quelques respirations suffisent à faire s'envoler l'envie qui a prit possession de lui. Penser trop au sang renforce la bête... Mais comment ne pas pensez à cette femme, si belle, si près ?

Combien de temps dura le baiser ? Impossible de le dire lorsque le temps n'a plus d'impact sur soi. Raven se laissait totalement aller et ce même si elle savait qu'il n'était pas correct d'en arriver à un échange aussi personnel alors que les deux êtres venaient à peine de se rencontrer. Néanmoins, la jeune femme ne pouvait s'en empêcher et se délectait du goût des lèvres d'Ismahel sur les siennes. Le contact en était aussi froid que sa peau d'albâtre. Comment pouvait-on avoir une peau aussi claire, bien plus clair que celle de Raven. La jeune femme en était là de ces interrogations, là de ces pensées fortement inutiles dans cet échange puissant et doux. Alors, quand Ismahel s'écarta vivement d'elle, l'artiste elle regarda complètement perdue par l'attitude de ce dernier. Qu'est-ce qu'il avait ?

Néanmoins, Raven ne dit rien, elle resta calme et sereine. Ce fut une attitude salvatrice, car la demoiselle avait également besoin de reprendre son souffle. Le baiser fut si intense que Raven avait eu l'impression que sa vitalité disparaissait à chaque seconde, comme si Ismahel avait capturé peu à peu son âme pour la posséder tout entière et pas seulement les lèvres pourpres de la chanteuse.

Un petit moment. Rien qu'un instant avant que Raven ne pose sa main sur l'épaule de celui qui était en réalité un vampire, dans la logique des choses, un prédateur extrêmement dangereux pour elle. L'artiste sourit et invita le vampire à se retourner à nouveau vers elle pour se perdre dans l'améthyste de son regard. Elle lui sourit tandis que sa main chaude de vie passe de son épaule à la joue de ce dernier.

- Qu'avez-vous ? Aurions-nous fait une erreur ?

Raven s'abstenue de dire que s'il souhaitait qu'elle s'en aille, elle le ferait. Rien que d'y penser faisait naître en son coeur, une certaine douleur. La jeune femme préféra balayer cette option de son esprit et se contenta de laisser sa main sur le visage pâle d'Ismahel ainsi que le sourire sur ces lèvres. L'envie de se blottir contre lui la submergea, mais elle se garde bien de le faire. Car, elle savait que les convenances de cet homme étaient basé sur un autre temps plus chevaleresque et que cela serait audacieux pour Raven que de laisser parler une envie comme celle-ci pour une rencontre aussi jeune que fut celle d'Ismahel et Raven.

- Dites-moi tout.... Le baiser fut-il une erreur ?

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