[Temporellement parlant le rp se déroule la veille de celui que j’ai en cours avec Jaime]

Parfois, il était des choses absolument inexplicables. Des choses qui arrivaient lorsqu’on débarquait en ville, des choses qu’on ne cherchait même pas à comprendre. Keith avait reçu ce sms, il avait pesé le pour et le contre, puis s’était fait la malle comme un voleur, n’emportant que quelques affaires avec lui. L’essentiel, ce sac de voyage. L’accessoire, ce chapeau. Le superflu, son humour. Ces trois éléments se conjuguaient dans un mélange singulier. Il marchait, vêtu comme un homme du siècle dernier – par chance cette mode qu’on appelait le steampunk était florissante, et il se fondait sans peine dans la foule habituée à pareille excentricité – portant sur le sommet du crâne un magnifiquement élimé chapeau haut de forme. Sa veste était elle aussi défraîchie, un peu abîmée aux coudes, rapiécée sur une épaule. Son Jean, lui, était neuf, une trouvaille en chemin. Son propriétaire s’en était allé en couinant après avoir vu un spectre au bord de la route… Mais qui avait bien pu poser cette illusion là, Keith se le demandait vraiment.

Et maintenant, il était là, dans la cité des Anges, l’estomac calé, la vielle soigneusement rangée dans sa sacoche de cuir, un jeu de cartes ancien dans la main. Ce n’était pas un tarot – oh, il en avait un dans ses bagages, là n’était pas la question – mais un simple jeu, de cinquante-deux cartes, qu’il manipulait avec tant d’habileté que l’amusement public était devenu sa source de revenus numéro un. Il fallait bien l’avouer, la chimérie conjuguée à son don pour les tours de passe-passe avait quelques avantages.

Mais enfin, ce soir, il allait falloir ruser. Il venait d’arriver dans une ville qu’il ne connaissait guère, et ses premières préoccupations étaient surtout de trouver un lieu où se reposer pour le lendemain. Finir couvert de cloques ou en tas de cendre le premier jour, très peu pour lui. Il avait d’importantes choses à faire, en premier lieu, trouver Asao. Ce petit forban avait mis les voiles sans préavis, et il lui ferait passer l’envie de recommencer. Après tout, il suffisait d’un seul mot de lui aux hautes autorités des Tremere pour que le sorcier se retrouvât en position délicate.

Mais ce n’était pas le genre de la maison, après tout, on était un honnête Gitan, ou on ne l’était pas. Et en ce qui le concernait, il l’était tout à fait.

*Tu te voiles la face, mon petit Keith*

Allons bon, voila que ça le reprenait. Parfois, il lui arrivait de percevoir un murmure à la frontière de l’audible, un murmure qui lui rappelait une désagréable vérité biologique… Mais, là n’était pas la question immédiate.

Ses mains désoeuvrées avaient entrepris de battre les cartes du jeu… à qui donc allait-il proposer un petit spectacle. Tiens cette demoiselle là bas, elle semblait bien sympathique, en plus, elle n’avait pas l’air dans son assiette, c’était l’occasion de lui faire une petite blague qui, si elle avait le sens de l’humour, lui rendrait peut-être le sourire.

« Mademoiselle, vous feriez de moi le magicien itinérant le plus heureux du monde si vous acceptiez de prendre une carte pour un tour de magie. Voyez-vous, il est rare de croiser aussi belle assistance que vous en cette assemblée. »

Je sors tout droit d’une engueulade, encore une. Ça devient vraiment une habitude ces derniers jours. Ma rencontre avec Shiro a bouleversé pas mal de choses, et je crois bien que ce n’est qu’un début. Est-ce que je regrette ma vie d’avant ? Non. Mais pour une fois, je tuerai pour une soirée sans embrouilles, sans Vampire, sans mort, sans… sans rien de spécial qui sorte de l’ordinaire.

Une dispute, donc, qui a fait beaucoup de bruit. Ma meilleure amie vient de me reprocher d’être injoignable et d’avoir un comportement qui ne me ressemble pas. En effet, ça ne me correspond pas de traîner les rues à des heures innommables, ou de côtoyer des vampires… En même temps pour ce dernier point, c’était à la base totalement indépendant de ma volonté. Est-ce que j’ai fait exprès de tomber sur ce vampire ? Non. Absolument pas.

Je me sens fatiguée, en vérité, je n’ai qu’une envie, c’est de me trouver un coin tranquille, loin de tout, loin du bruit, loin des vampires, loin de ma famille, loin de…

« Mademoiselle, vous feriez de moi le magicien itinérant le plus heureux du monde si vous acceptiez de prendre une carte pour un tour de magie. Voyez-vous, il est rare de croiser aussi belle assistance que vous en cette assemblée. »

Quoi ? Ce type aux allures du siècle dernier, dont l’état du costume me laisse à penser qu’il est un sans domicile fixe ose venir m’aborder ? Il n’a pas senti l’aura de colère autour de moi ? Celle d’agacement, peut-être ? Ou mon air excédé ? Apparemment pas, le voici à me présenter un jeu de cartes déplié en éventail et à m’encourager à prendre une carte. Non… mais… il est sérieux ? Est-ce que j’ai une tête d’assistante de magicien, moi ?

- Je pense que je vais passer mon tour, si ça ne vous ennuie pas. Je ne me sens pas d’humeur à assister à un spectacle de rue. Et si vous alliez emmerder quelqu’un d’autre ?

Non, vraiment, si l’agacement ne se perçoit pas, là, je ne peux rien pour ce type. Quelle idée aussi de venir proposer un tour de cartes précisément à la personne qui en a le moins envie.

En ce qui me concerne, entre la rencontre Shiro/Asao et celle Shiro/Flam

[HJ : tu te Lasombrises, le sang de Shiro a un effet déplorable xD Bon, du coup, j’assume que papa Lasombra va me haïr xD]

Quelle surprenante enfant était-ce là. Elle avait semblé si fragile, si désemparée, et voila qu’elle lui rétorquait ainsi cette phrase oh combien amusante.

- Je pense que je vais passer mon tour, si ça ne vous ennuie pas. Je ne me sens pas d’humeur à assister à un spectacle de rue. Et si vous alliez emmerder quelqu’un d’autre ?

Keith ne se départit pas se son sourire, il y avait quelque chose d’extrêmement amusant dans la résistance de ses proies… Mais cette jeune fille ne saurait être une proie. Non, pour le moment, elle était encore trop farouchement persuadée qu’elle se débarrasserait ainsi d’elle.

Il s’approcha d’elle, piocha une carte sans la regarder, et la lui fourra de force dans la main, face retournée afin qu’il ne la vît pas. Profitant du contact de la main qui avait empoignée celle de la jeune humaine, il s’appliqua à apaiser les sentiments qui habitaient l’esprit de la jeune fille. [Passion 1 : augmente ou diminue un sentiment/une peur dans l’esprit de la victime, sentiment aléatoirement choisi : je te laisse donc le choix.] Une fois qu’elle fût en possession de la carte, il fit un pas en arrière sans lâcher sa main.

« Ne me refuse pas ton aide, s’il te plaît, on a toujours besoin d’une jolie assistante pour capter l’œil et l’attention du public. Mais ce soir, ce sera toi mon public si tu le veux bien. Promis, je te laisserai en paix après ce petit tour. Je vais deviner la carte que tu as dans la main, d’accord ? Regarde là, puis dissimule la de façon à ce que je ne puisse pas la voir. »

Dès lors, il lâcha la main de la jeune fille, s’éloigna d’un pas ou deux, et battit le jeu qu’il avait toujours dans la main. Il le lui tendit à nouveau.

« Puis-je te demander de tirer deux cartes à nouveau ? Après tout, si le jeu était trop facile, ce ne serait pas drôle, n’est-ce pas ? »

D’un petit geste de la main, pure habitude, il s’employa à appliquer à la surface des cartes l’illusion de son choix. [chimérie 1 : illusion statique immobile sur les cartes] La jeune fille avait donc désormais en main le roi de pique et l’as de cœur qui recouvraient deux cartes aléatoirement prises sans qu’il eut besoin de se soucier de ce qu’elle avait choisi… Quant à la première carte, c’était le sept de trèfle, il l’avait vu lorsque la jeune fille s’était emparée du morceau de papier défraîchi.

Il ne veut pas me lâcher, celui-là, et ce n’est pas parce qu’il est beau gosse que je vais le laisser faire. Il me prend la main, m’y colle une carte de force, je vois le sept de trèfle qui entre en contact avec ma peau, et me parle. Ses mots sonnent étrangement à mes oreilles, sa voix me semble particulièrement mélodieuse, je me sens comme envahie par une vague soudaine de paix. Après tout, pourquoi pas ? Qu’ai-je à perdre à me changer les idées ? Je souffle un grand coup, j’essaye de sourire, et j’opine tandis qu’il me lâche ces mots.

« Ne me refuse pas ton aide, s’il te plaît, on a toujours besoin d’une jolie assistante pour capter l’œil et l’attention du public. Mais ce soir, ce sera toi mon public si tu le veux bien. Promis, je te laisserai en paix après ce petit tour. Je vais deviner la carte que tu as dans la main, d’accord ? Regarde là, puis dissimule la de façon à ce que je ne puisse pas la voir. »

Je note le tutoiement subit. Il ne me dérange pas, après tout, il ne doit pas être très âgé. J’obtempère, je glisse la carte dans ma poche. Dès lors, sa main me lâche, et il me présente à nouveau son jeu de cartes.

« Puis-je te demander de tirer deux cartes à nouveau ? Après tout, si le jeu était trop facile, ce ne serait pas drôle, n’est-ce pas ? »

J’obéis encore une fois, me piquant au jeu. Le roi de pique et l’as de cœur. Joli mélange. J’ajoute les cartes à leur sœur dans ma poche. J’ai envie de lui répondre, envie de le taquiner, envie de m’amuser.

- Tu te dis magicien, pas vrai ? Dans ce cas, je me demande comment tu vas pouvoir deviner ces cartes. Je suis sure que tu as vu la première, mais, les deux autres. Pourras-tu le faire ? Tiens, tu veux qu’on parie ? Je suis sure que tu te tromperas au moins sur une carte.

J’attends, tout sourire. Puisqu’il est là, puisque je suis là, autant en profiter pour oublier le stress des derniers jours. Après tout, j’ai croisé si peu d’humains les jours passés que j’ai une furieuse envie de profiter de sa présence, là. Pour une fois que c’est pas un vampire qui se met sur mon chemin !

Mais il est gentil Shiro, je ne vois pas de quoi tu te plains, c'est toi qui cherche les emmerdes là xD

La jeune fille s’était laissée convaincre en douceur, bien, bien, voici qui était de très bon augure pour le magicien. Le désordre de son âme n’avait été que passager, et elle était désormais tout ouïe à ses blagues et à ses tours. Ainsi était son petit rite personnel, il y tenait, c’était sacré. Dans chaque nouvelle ville, il se faisait fort d’éblouir le passant de ses tours. La Passante, en l’occurrence, ce soir là, car elle était fichtrement jolie, en plus, sa passante.

Fichtrement jolie, et fichtrement drôle, en prime. Elle avait percé à jour le plus évident de ses tours, bien entendu qu’il avait vu cette première carte, après tout, il était illusionniste, non enchanteur. Mais percerait-elle son autre petit secret ? Oh, comme il serait drôle de lui faire comprendre l’existence du surnaturel si elle le taquinait un peu trop.

- Tu te dis magicien, pas vrai ? Dans ce cas, je me demande comment tu vas pouvoir deviner ces cartes. Je suis sure que tu as vu la première, mais, les deux autres. Pourras-tu le faire ? Tiens, tu veux qu’on parie ? Je suis sure que tu te tromperas au moins sur une carte.

Il s’inclina avec grâce devant la jolie détentrice des mystères de la magie.

« Belle Marquise, vos beaux yeux ont percé mon secret, je le crains. Ce sept de trèfle n’est en effet pas un mystère pour mon esprit, mais ces deux autres cartes que vous me proposez de deviner… Oui, je relève le défi. Si je me trompe, tu pourras exiger ce que tu veux de moi, mais si je gagne… que m’offres-tu si je gagne ? Pourrais-je espérer de toi quelque chose qui vaille la peine de mettre en péril ma soirée ? »

Il s’était approché, puis, devant la mine de la jeune fille, il éclata de rire.

« Si je gagne, accepteras-tu de jouer avec moi ? De jouer aux cartes, bien sur. »

Oui, une idée avait germée dans la tête de notre Malkavian Ravnos préféré, et il était temps pour lui de la mettre en application. Cette jeune fille était une proie facile et surprenante à la fois. Une proie avec une âme de chasseuse. Une proie fichtrement intéressante. Elle marchait déjà en bordure du chemin, il ne lui faudrait qu'un pas pour basculer. Un simple pas, pour comprendre quel était ce monde.

Keith s’étonna quelques secondes de ce que la jeune beauté ne cherchait même pas à marchander, puis, bien vite son esprit farceur reprit le dessus. Tout Ravnos ne tenait serment que lorsqu’il crachait dans sa main avant de serrer celle de son interlocuteur, et, ce soir, il n’avait pas envie de se lier à un serment. Aussi ne fit-il pas cette démarche, on verrait bien où mèneraient ces pas, cette danse, ce jeu, et tant pis si le monde des Ténèbres devaient compter un membre de plus ce soir… Mais Keith avait pour principe de ne pas brûler les étapes. Le jeu, il fallait bien commencer par là.
 
Il fronça les sourcils, faisant mine de se concentrer âprement, puis il sortit une petite sphère de cristal de roche du fin fond de sa proche. L’objet pesait son poids faisait dans les cinq centimètres de diamètre, et s’était logé sans problème dans le creux de sa paume.
 
«  Cet épineux problème nécessite une aide surhumaine, jolie demoiselle, tu n’es pas d’accord ? Alors, voyons ce que me dit la boule de cristal… Je voiiiiis, je voiiiiiiis… hm… difficile. Je vois du cœur, un cœur unique, ce doit être l’as… Je vois aussi… que vois-je ? Oh… une figure sombre, un homme, il doit être roi… Le roi de pique ?»
 
Faisant un grand sourire, le magicien leva les yeux vers la jeune fille.
 
«  Alors ? Verdict ? »
 
Déjà, mentalement, il préparait son petit tour suivant. A n’en pas douter cette partie de cartes serait mémorable pour la jeune fille, pour lui aussi qui aimait bien les jeux bien ficelés. Oh, il ne serait pas question d’enjeux et de paris, non. Après tout, rien n’était plus beau qu’une petite manipulation bien orchestrée. Rien n’était plus grand qu’un petit tour qui semblait naturel. De la chance, il lui en faudrait ce soir, mais… fort heureusement, les fils de Ravnos en avaient à revendre, en général, et ce n’était pas lui qui dirait le contraire en cette soirée.
 
«  Au fait, tu peux m’appeler Keith, ce sera plus commode que “Magicien sans nom” qui est, cependant, je te l’accorde, le reflet de tout un programme. Et d'ailleurs, comment dois-je nommer la plus jolie demoiselle de cette cité des Anges?»

La petite humaine était surprenante et adorable à la fois. Keith s’en étonnait, tant de candeur, le faisait-elle exprès ou était-elle un peu naïve ? Bien, bien, il lui faudrait donc ce soir oublier un peu sa candeur d’enfant, songeait-il, il lui faudrait ce soir ouvrir les yeux.

La voix de la jeune fille laissait transparaître son étonnement, il se lisait d’ailleurs sur son visage. Résisterait-il à l’envie de la taquiner ? Non. En subtilité, tout devait toujours se jouer en subtilité. Il récupéra les trois cartes des mains de la jeune fille, prit les deux qui étaient sous le coup de l’illusion, les manipula quelque peu pour faire durer le suspens, et dissipa la chimère. C’est alors qu’il brandit un deux de trèfle et un valet de pique sous le nez de la jeune fille.

« Les Cartes ont une volonté propre, charmante Gabrielle, on l’apprend avec le temps. Si on les écoute, ma foi… on sais tout, on peut tout savoir. »

Quel beau mensonge bien ficelé, quelle jolie blague bien orchestrée, à tous les coups, cela ne satisferait pas sa curiosité, et il pourrait poursuivre son petit jeu. S’amuser aux dépends d’une humaine vive d’esprit et candide à la fois était après tout un passe-temps tout à fait divertissant. Mais elle avait accepté la partie, elle acceptait le jeu. Le sourire de Keith s’étira. Déjà, de sa poche intérieure, il sortait un jeu de cartes bien plus ancien que le précédent, un jeu qu’il gardait précieusement, pour l’avoir trouvé dans l’étui de sa vielle. Il aimait à le penser investi sinon d’un pouvoir mystique, au moins d’un symbole.

Combien d’années ces cartes avaient-elles traversées ? Combien de mains les avaient-elles manipulées ? Observant avec soin Gabrielle, notant le moindre de ses changement d’humeur, il ne cessa pas de battre les cartes, puis, calant son jeu dans une main, il entraîna la jeune fille un peu à l’écart, et s’assit devant elle, lui faisant signe de l’imiter.

« Une partie une seule, tu l’as dit, Gabrielle, et je le respecterai. Point de Bataille. Point de Poker. Point de jeux conventionnels. Ce soir, Gabrielle, avec cinq cartes que tu piocheras, je te dirai ton passé, ton présent, et ton avenir. Ce soir, si tu le veux bien, tu seras porteuse d’un savoir nouveau, qui risque bien de faire vaciller toute ton existence. C’est un cadeau empoisonné que de savoir, et je ne comprendrai jamais les humains qui veulent absolument avoir connaissance de leur avenir. Mais tu as perdu, acceptes donc ce poids sur tes épaules. »

Il se remit à battre les cartes, récitant pour lui-même les couplets de cette éternelle litanie qu’il entendait encore, la voix de son ancêtre le porta tandis qu’il accomplissait son premier tour, ici, en ville.

« Choisis cinq cartes à ton gré, sans les regarder cependant. »

Il lui tendit le paquet replié, et la laissa opérer.

Je ne sais comment réagir aux assertions de Keith. Il me semble extrêmement bizarre sur certains points. N’est-il pas capable de parler de tour de carte et de volonté propre pour ces mêmes cartes à deux phrases d’intervalles ? Je n’arrive pas à le cerner, il semble, plus que Shiro encore, imperméable à toute tentative de compréhension. Une énigme, en somme, une énigme que je me plais à espérer élucider au cours de cette partie de cartes.

Il a dans la main un second jeu de cartes, un objet qui me paraît ancien, peut-être trop ancien compte tenu de la jeunesse de celui qui le porte. De même que cette redingote et ce chapeau. Est-ce un adepte d’un style retro ? Un Sans Domicile Fixe ? Autre chose ? Non, Gabrielle, ne commence pas à voir du surnaturel partout, on ne va pas s’en sortir. J’opte pour le choix le plus logique : un sans domicile fixe, ce qui explique au passage ses activités de magicien itinérant.

Il bat les cartes, le mouvement de ses mains est hypnotique, je trouve. Enchanteur et hypnotique, il m’invite à m’asseoir près de lui, et prend la parole pour des mots qui, je le sens déjà, resteront un bon moment dans ma mémoire.

«Une partie une seule, tu l’as dit, Gabrielle, et je le respecterai. Point de Bataille. Point de Poker. Point de jeux conventionnels. Ce soir, Gabrielle, avec cinq cartes que tu piocheras, je te dirai ton passé, ton présent, et ton avenir. Ce soir, si tu le veux bien, tu seras porteuse d’un savoir nouveau, qui risque bien de faire vaciller toute ton existence. C’est un cadeau empoisonné que de savoir, et je ne comprendrai jamais les humains qui veulent absolument avoir connaissance de leur avenir. Mais tu as perdu, acceptes donc ce poids sur tes épaules. »

Deux choses. Il accepte de ne faire qu’une seule partie, et cela me ravit, mais il s’agit de me lire les cartes. Un cadeau empoisonné, voici ce qu’il dit, et je le crois. C’est le genre d’expérience dont je me passerai volontiers. Je lis tellement de livres, j’ai eu connaissance de tellement de choses ces derniers jours qu’un magicien itinérant doué de double vue ne me paraît même pas aberrant, il va falloir se ressaisir ma petite, tu dérailles, là, tu dérailles complètement.

« Choisis cinq cartes à ton gré, sans les regarder cependant. »

Il m’a tendu le paquet de cartes, je l’ai désormais dans les mains. Il me semble précieux de par son ancienneté, et c’est avec un grand soin que je prélève un peu partout dans le paquet les cinq cartes demandées. Une pile de cartes dans une main, les cinq cartes dans l’autre, je lui demande.

« Et maintenant ? Suis-je censée croire que tu es capable de me lire l’avenir dans ce jeu ? »

La voix de Gabrielle était un défi, un appel, un encouragement. Keith exultait. Malgré elle, la jeune fille s’était sans doute piquée au jeu, ou alors prêtait-elle quelque crédit au monde des Ombres ? Dans les deux cas, elle faisait une proie non pas facile mais intéressante, et cela, il ne fallait surtout pas le laisser passer. La jeune file pouvait basculer, il le sentait, elle pouvait être tentée par ce monde, elle avait peut-être déjà même quelques prédispositions à le comprendre, c’était bien sa veine.

Il prit en douceur les cinq cartes, et les retourna une à une. Dans l’ordre, dix de trèfle, valet de pique, dame de cœur, sept de carreau et roi de pique, deux figures fort intéressantes, un peu de psychologie de base, Keith se lança en priant pour que son tour prenne. Il se composa une figure bien plus assurée que ce qu’il était en réalité, et tapota du bout des doigts sur la première carte. Sa voix d’était faite plus grave, plus profonde, il semblait prêt à livrer à la jeune humaine un secret terrible.

« Commençons par le dix de trèfles. Le dix est symbole de stabilité, d’équilibre, le trèfle peut être associé à de nombreuses choses, la chance, la routine. Je pense donc chère Gabrielle que cette carte me dit que ta vie était, jusqu’à récemment, un long fleuve tranquille. »

Il prit une pause, ménageant son petit effet. Effleurant de ses doigts la carte suivante, il la fit tournoyer un moment sur le sol, et se remémora l’expression qu’avait eue la jeune fille un peu plus tôt dans la soirée.

« Ces bouleversements proviennent du Valet de Pique, un être que tu as rencontré, n’est-ce pas ? Un garçon fascinant et mystérieux qui t’attire, pas vrai ? »

L’amour était bien souvent le cas numéro un du genre d’expression qu’il lui avait vu sur le visage, aussi pensait-il ne pas se tromper. Que faire des autres cartes ? Lui dire l’avenir, bien entendu.

« Nous avons les causes, explorons les voies possibles, le veux-tu ? Trois cartes, trois voies d’avenir, à toi de choisir celle qui te sied le mieux. La Dame de cœur Aime et Cède, elle est à la fois forte dans sa résolution, et faible dans les élans de son âme. Te sens-tu de cèder à ta mystérieuse rencontre ? »

Il prit la carte suivante.

« Le sept de carreau est une barrière, tu peux l’ériger, et lutter contre les élans de ton âme. Tu peux entourer ton esprit de ce rempart, et t’éloigner de tes tourments pour retrouver un semblant de stabilité. »

La dernière carte, il la lui mit dans la main.

« Le roi de pique, le roi des ombres. Le dernier chemin, le plus ardu, le plus difficile, le plus mystérieux. Quelque soit ton choix pour ce garçon, le roi des Ombres te trouvera toujours, il sera toujours sur ta route. Es-tu destinée à le rejoindre ou à lui résister, cela, je ne peux te le dire, mais il est là. C’est une voie qui s’ouvre à toi, une voie dont je peux te parler si tu le désires. Un chemin… peu conventionnel, à côtoyer le réel et l’irréel. »

Déjà, le Ravnos se préparait à une réaction violente, s’il n’avait réussi à toucher son cœur par ses paroles, il lui faudrait la laisser partir. Si en revanche il avait touché juste par quelque déduction, alors il pourrait l’approcher.

Keith me parle, j’écoute. Assise près de lui, je le laisse dérouler sa prophétie, certaine qu’il ne touchera pas une seule fois juste. Quelle n’est donc pas ma surprise, une désagréable surprise, lorsque ses mots trouvent un écho dans mon passé récent et ravivent de bien étranges sentiments que j’avais pensés enfouis pour la soirée.

Il commence par la routine, oui, cela est vrai. Jusqu’à il y a peut, ce mot là empoisonnait mon existence, c’est vrai. Il y a peu, j’étais une jeune fille sans histoire, que rien n’aurait pu écarter du droit chemin de la quiétude.

Il enchaîne, la rencontre. Est-il besoin de préciser à quoi, à qui plutôt, je pense ? L’ombre, le Valet de pique, Shiro. Au moment où il prononce ces mots, je le crois, Keith m’a persuadé sinon de sa clairvoyance de son redoutable sens de l’à-propos. Shiro m’attire, oui. Est-ce de l’amour ? Non. Peut-être. Je n’en sais rien. Qu’est-ce que je ressens pour lui ? Je suis bien en peine de l’expliquer.

Il enchaîne, une prédiction. Trois voies. Les deux premières sont attendues, la dernière est énigmatique. Ce roi des Ombres sur sa route l’obsède et la trouble. Est-ce Shiro ? Est-ce une autre chose ? Une voie dont il peut lui parler, un chemin qui fait écho à ce fameux soir, lorsqu’elle a bu le sang de Shiro, un écho à cette promesse qu’il lui a faite, il veillerait toujours sur elle, serait toujours son ombre.

- Je te remercie de ces mots, Keith. Je ne te croyais pas, mais… soit tu es un voyant, soit tu es un fin psychologue. Beaucoup de choses que tu as dites sont sans doutes vraies, ou du moins en accord avec ce que je ressens.

Je tremble un peu. Je n’avais pas le souvenir qu’il fasse si froid. Je lui souris, je continue, je ne sais pas trop quoi penser de ses paroles, mais elles me semblent justes et prophétiques.

- Ce chemin dont tu parles… Tu n’as probablement pas idée de ce que c’est, mais… j’ai déjà un pas dessus oui. Le Roi des Ombres veillera sur moi, j’en suis certaine à présent. Ce valet et ce roi de pique sont la même personne, oui. Je vais devoir rentrer, Keith, mais je te remercie.

Le Roi des Ombres, le Valet des Ombres, Shiro, maître dans les ténèbres et fidèle gardien, c’est vers toi que se tournent mes pensées maintenant. Suis-je prête à suivre la route sur laquelle tu marches ? Cela en revanche je l’ignore.

Je me lève, prête au départ.

La jeune fille s’était montrée étonnamment sereine, une victime ou bien… ? Non, elle était bel et bien humaine, Keith le voyait à son aura, et pourtant, cette sérénité, cette impression qu’elle savait, que le monde des ténèbres la touchait déjà.

Savait-elle quelque chose qu’elle ne devrait pas savoir, ou bien Keith se faisait-il illusions ou faux espoirs ? Une seule façon de le savoir, une seule façon de deviner. Cette façon là n’était certainement pas celle qui lui laisserait le moins de séquelles, mais il devait savoir, il lui fallait comprendre et deviner, percevoir, ressentir.

Gabriele se leva, annonça son départ. Non ! Surtout pas, elle ne devait surtout pas partir si tôt. Il lui fallait interdire l’oubli dans cet esprit, il lui fallait le marquer. D’ordinaire, il usait du son de sa vielle, mais pour ce soir, il en irait autrement. A son tour, il se leva, rangea les cartes, et prit vivement la main de la jeune fille.

« N’aies pas peur. »

Une simple prière, une simple demande, même pas accompagnée d’un pouvoir quelconque. Il l’entraîna à sa suite dans une ruelle qui lui sembla déserte. Elle l’était, ses sens ne l’avaient pas trompé. Il percevait le cœur de la jeune fille qui battait à tout rompre. Comme il serait tentant de faire taire ce cœur pour l’attirer dans ses filets.

*tu ne l’étreindras pas. Elle deviendrait folle. Laisse-lui la lumière de son esprit.*

Keith ignora le sermon pourtant tout à fait véridique. Il ne l’étreindrait pas, mais ce n’était pas pour cette raison. Il ne pouvait s’embarrasser d’un infant, même si l’idée était tentante. Il ne pouvait faire cela, en revanche, il y avait bien une chose qu’il pouvait faire.

« Tu dis que le roi des Ombres veille sur toi ? Très bien, voyons à quel point il veille sur toi. »

Lentement, il la plaqua contre un mur, sans qu’il n’y eut pour autant un geste déplacé. Keith n’avait pas l’apanage d’un violeur, cela ne l’intéressait pas. Tout ce qu’il voulait lui voler, c’était un peu de sang. En douceur, il approcha les lèvres de sa gorge, l’effleura. Puis il y planta en douceur ses crocs, avalant deux gorgées ou trois de la vitae, avant de refermer la plaie d’un baiser. Une goutte perlait encore au coin de ses lèvres lorsqu’il sourit à la jeune fille.

« Alors ? Le Roi des Ombres te protège-t-il des vampires ? »

[HJ: Shiro me dit que le Roi des Ombres est la façon dont se fait appeler John Lee Peacecraft au sein de la Société vampirique, donc il serait bon d'éviter le terme ^^' je ne l'avais pas calé, désolée.]

Keith était profondément songeur face à cette délicieuse énigme. Délicieuse au sens premier du terme, bien entendu, mais pas seulement. La compagnie de Gabrielle était pour lui extrêmement plaisante, une humaine qui était drôle et ingénue à la fois mais… donnée intéressante, qui connaissait les vampires. Comment avait-elle pu rester si vive et fraîche en ayant déjà un pied dans ce monde figé et nocturne ? C’était là un mystère que l’âme d’enquêteur de notre Gitan préféré se faisait fort d’élucider. Il ne tenait pas particulièrement à une réponse, et toutes lui sembleraient satisfaisantes.

Comme un papillon, il se sentait l’irrésistible envie de voleter autour de cette flamme, pas par amour ou par passion, mais parce qu’il pressentait qu’elle était au cœur d’une bien singulière tourmente. Et le spectacle, ça, oui, ça l’attirait. Un spectacle gratuit, une occasion en or de contempler le chaos, bien sur que ça l’attirait !

Il se fendit d’une petite blague, histoire de détendre l’atmosphère. Ce Semblable qui avait si bien élevé un rempart autour de la psyché de la jeune fille, qui lui avait si bien appris ce qu’étaient les vampires, et qui avait par la même occasion cassé toute la splendeur de la révélation… Eh bien il voulait savoir qui il était, de quel clan ? Avait-il vu juste avec les Ombres, et était-ce un Lasombra, ou bien notre jeune Gabrielle avait-elle simplement repris une expression qu’il avait malencontreusement lâchée.

*Un lasombra… tu le saurais si tu voulais bien prophétiser…*

Ta gueule !

Keith décida donc de s’amuser un peu, tout en prenant la main de la jeune fille pour l’entraîner dans une paisible promenade au clair de lune… Bon, d’accord, la lune ne brillait guère, dissimulée derrière les nuages, mais c’était pour l’effet dramatique, voyons !

« Chère Gabrielle, que veux-tu ? Nous avons beaucoup de mauvais côté, mais le temps nous a donné l’occasion d’affûter les meilleurs. Tiens, crois-tu qu’un jeune homme serait parvenu à te jouer tous ces tours, et à t’amener dans cette ruelle ? Non, il serait reparti lorsque tu me demandais de débarrasser le plancher, et il n’aurait pas su transformer ces cartes. Houps, pardon ! J’ai lâché mon secret le plus inavouable ! »

Quel étrange assortiment ils formaient, la jeune fille avec sa longue chevelure rousse, le dandy d’un autre temps avec son haut de forme élimé.

« Et dis-moi, joli petit ange, qui est donc ce semblable qui a si bon goût qu’il me vole la plus belle femme de cette cité ? »

(HS : pas de souci ^^)

Il m’entraîne, cela n’en finira-t-il donc jamais ? Malgré moi, je me sens une certaine sympathie pour ce vampire. Un genre différent de celui de Shiro, un rythme différent, une bien étrange rencontre, ça oui. Keith est charmant. Collant et déroutant aussi, mais charmant en tous les cas. Je me sens plutôt bien en sa compagnie, ce n’est pas comme avec Shiro, bien entendu, le magicien est beaucoup plus imprévisible, mais tout aussi sympathique. Il a un bon fond, j’aime à le croire, même si ce n’est peut-être pas vrai.

Ses paroles me font rire. Il a trafiqué les cartes. Un pouvoir de son clan ? De sa faction ? Un simple « truc » de magicien, je veux en savoir plus, et le meilleur moyen de le faire parler est peut-être bien de parler moi-même tout en tentant d’orienter la conversation. Un exercice auquel je n’excelle pas, mais qui peut se révéler efficace, parfois, lorsqu’il s’agit de tirer les vers du nez d’un magicien.

D’accord, je l’avoue. J’aime la magie et les illusions. Est-ce ce qui me charme chez Shiro ? Est-ce ce qui m’amuse chez Keith ? Je ne saurai pas vraiment le dire, et peut-être vaut-il mieux, parfois, ne pas le savoir. Je ne peux pas m’empêcher de me poser la question, pourtant.

- Le temps t’a surtout donné l’occasion d’affûter tes petits tours, non ? Transformer des cartes ? Comment peux-tu faire cela ? Est-ce que ça a un rapport avec… Eh bien avec ce que tu es ? Et d’ailleurs… qu’es-tu exactement ?

Des questions, encore des questions, toujours des questions. Je ne pense pas pouvoir arrêter d’en poser un jour, et c’est, au final, très bien comme ça. Comme la vie serait ennuyeuse sans découvertes à faire, sans nouvelles pistes à explorer. Cela, c’est la rencontre avec Shiro qui me l’a apprise.

- Il s’appelle Shiro, il appartient au clan des Ombres, m’a-t-il dit.

J’ai été franche, j’attends désormais qu’il le soit également. Mais comment en être certaine ? Comment savoir s’il me ment ou non ? Je n’ai plus qu’à compter sur sa bonne foi, si tant est qu’il en a un semblant….

bande-son: Le Grand coureur – Luc Aborgast

La jeune fille était lumineuse à l’esprit de Keith, il la voyait comme un tourbillon de couleurs, comme un chatoiement dans les ténèbres. Un pas de danse, un accord vibrant, un esprit brillant dans tous les cas. Ses questions lui donnaient envie de s’incliner, de lui tendre la main, de l’emmener valser au son d’une quadrille. Elle avait dans sa troublante sensibilité une jeunesse d’âme, une innocence qui étaient à préserver, et pourtant… pourtant elle n’était pas faible, capable sans doute de bien grandes choses.

Ce n’était pas n’importe qui, non. Une jeune fille choisie par les ombres. Le Ravnos devait-il l’effrayer, lui faire renoncer à son projet ? Non… il la laisserait rejoindre les ténèbres. Pourquoi faire une telle chose ?

*parce que tu sais que si tu la mords… oui, si tu la mords…*

Il ne voulait pas lui infliger un destin si terrible que le sien, un destin de folie. Elle méritait d’être libre. Le serait-elle, liée aux Abysses ? Il ne le savait pas exactement, et c’était la question qu’il se posait alors que ce jeune papillon se tournait vers elle pour lui parler.

Il fallait lui répondre, peut-être une des dernières paroles de cette soirée. Sa désarmante honnêteté avait de quoi chambouler le cœur le plus las. Keith était las de la fuite, las du mensonge, las du secret. Placer ses espoirs en cette jeune fille était-il stupide ? Sans nul doute, c’était pourtant ce qu’il s’apprêtait à faire.

« Je suis un prophète. Un enfant de la lune. »

*Ah. Enfin tu le reconnais… *

« Cependant, mon âme n’est pas celle des enfants de la lune. Je suis aussi un gitan. Lorsque je suis devenu… ce que tu vois, une âme plus élevée, plus grande que la mienne m’a parlée, m’a menée dans cette vie. Mon destin ne m’appartient plus désormais. Je suis le pantin de mon Roi, le Roi de tous les Gitans. Il m’a demandé d’être un guide pour son peuple, et je m’y emploie. Désolé… je dois te paraître fou ! »

*petit con!*

Il sortit de son chapeau un jeu de cartes incomplet, une carte, un arcane. Il tendit à la jeune fille la Justice. Sans doute ce qu’elle serait par delà toute chose.

« Ce que je suis, ce que tu deviendras… ça n’a pas d’importance Jolie Gabrielle, tant que tu restes ce que tu veux être. Ne te laisse pas fléchir, ne te laisse pas manipuler. Sois toujours celle que tu souhaites, fais toujours les choix que tu désires. Mes conseils doivent te sembler obscures pour le moment, mais… tu les comprendras le moment venu, je n’en doute pas. »

Le musicien s’était fait plus lointain désormais. Il l’avait bien compris, l’heure de la séparation se profilait déjà à l’horizon. Quelle conduite à tenir ? Il ne le savait pas trop. A la vérité, il redoutait la séparation, mais elle pressait, elle s’approchait tout doucement, dénouement d’une histoire qui aurait pu se clore de bien des façons. Un dernier conseil, peut-être ? Un Dernier Adieu ?

« Nous ne nous reverrons sans doute jamais, douce Gabrielle. Alors laisse-moi te souhaiter bon vent. Les Gitans vont et viennent, mes pensées se tournent déjà vers l’Europe, vers Londres, lorsque mon cœur demeure pour un temps à Los-Angeles. Si malgré tout nous devions nous revoir, je m’agenouillerai devant toi, et tu pourras disposer de moi, rendre ton jugement, pour la frayeur que je t’ai faite ce soir. Parce que je n’ai pas voulu t’imposer le destin de Prophète, te voici libre de suivre ton chemin d’Ombres. Puisse ce Shiro prendre soin de toi, et le destin réunir à nouveau le chevalier servant et sa Dame. »

Je soulevai mon chapeau en un petit geste courtois, m’approchais d’elle, posais mes lèvres sur son front, et disparaissais dans la foule. A jamais peut-être.